Gallais René François

Ille-et-Vilaine , Bretagne

FFC
"Ceux de la Libération"

Auteur de la fiche : Soline Roffegallais

René Gallais

René Gallais est né le 16 mars 1892 à Pleugueneuc en Ille-et-Vilaine. A 15 ans, en 1907, il entre dans la marine à Brest comme mousse. Il fait toute la guerre 14-18 dans la marine et sa conduite au feu lui vaut une citation à l’ordre du régiment. Placé en congé de démobilisation en 1919, il s’installe à Nouméa en Nouvelle Calédonie où il épouse, en 1920, Andrée Chardin. En 1925, le couple et leur fille Huguette, née en novembre 1921, vont demeurer successivement à Boulogne sur Seine, Chatillon sur Indre, Angers. En 1929,Rene Gallais retourne seul à Nouméa pour y travailler, quand son beau frère lui annonce un poste vacant à Fougères.
. . . Ainsi en 1931, René Gallais devient guide et gardien au château de Fougères. A la déclaration de guerre, il n’est pas mobilisé en raison de son âge. En juin 1940, les soldats français fuient devant l’invasion allemande. Un cousin de la famille Gallais arrive à Fougères avec son régiment. Désespérés, les soldats commencent à casser leurs armes sur les murs du château pour que les Allemands ne puissent pas les utiliser. René Gallais pense spontanément à les récupérer, conscient de leur future utilité. Il les cache dans une tour du château.
. . . Dès le lendemain, des soldats allemands sont là et il doit leur faire visiter le château. Il se rend compte qu’il ne peut pas laisser les armes là car c’est trop dangereux. Le 18 juin, il entend l’appel du général de Gaulle à la radio et sans le connaître il lui fait confiance. Il dit à sa famille et à ses amis : « Les enfants, nous sommes sauvés. On a un chef… ». . . . . . Aussitôt, il s’organise, il trouve des agriculteurs dans des villages alentours qui acceptent de cacher des armes, il trouve des commerçants qui ont encore leur véhicule et qui veulent bien les transporter. Très vite, un groupe d’une cinquantaine de personnes est formé.
. . .En août 1941 , il rencontre le capitaine Chodet qui fait partie du réseau « Ceux de la Libération ». Aussitôt, le groupe Gallais s’y rattache et ainsi, est en liaison avec Paris.
. . . René Gallais, employé à la mairie de Fougères fabrique de faux papiers d’identité et fournit des cartes alimentaires aux premiers évadés. Il est appelé « La Toucheférond ».
. . . Andrée Gallais, son épouse,sous le pseudo JA reste à la maison et sert ainsi de relais pour passer des informations à son mari ou à ceux qui la contactent.

Huguette Gallais, leur fille est à l’école d’infirmières à Rennes et fait déjà partie d’un groupe de Résistants. Très vite, elle abandonne sa formation et rejoint le groupe à Fougères. Elle est chargée d’organiser des passages de clandestins en zone libre. Elle est appelée « Juanita ».
. . Le groupe héberge les officiers de l’Intelligence Service ou du BCRA. Il ravitaille et organise le retour vers l’Angleterre des parachutistes.

. . . Il fait parvenir à Londres des renseignements sur les troupes allemandes, sur leurs déplacements et sur les barrages organisés par les feldgendarmes. C’est le travail de Jules Frémont qui est transporteur et il obtient de nombreux renseignements par le gendarme Jagu.

Le groupe étant au point, René Gallais reçoit des Forces Françaises Libres de Londres l’ordre d’organiser son groupe en unité combattante. Il en est désigné chef pour Fougères et Jules Frémont pour Saint-Brice. Ils sont près à faire des sabotages mais ils sont trahis et arrêtés.

. . . Un couple a réussi à infiltrer le réseau en faisant croire qu’il a des contacts avec l’Angleterre, mais en fait, ce sont des autonomistes bretons du Parti National Breton de Mordrel et Debeauvais qui ont été recrutés par l’Abwehr pour dénoncer les personnes qui agissent contre l’armée allemande.
. . . . . Le 9 octobre 1941, de bon matin, les Allemands envahissent la conciergerie du château de Fougères où vivent René Gallais, son épouse Andrée et leurs deux enfants Huguette et Gérald. Ils fouillent la maison et les arrêtent tous les quatre. Ils son emmenés sur la place d’Armes avec une cinquantaine de membres du réseau. Ils sont enfermés dans des chambres de l’hôtel des Voyageurs jusqu’à ce que des cars viennent les embarquer pour Angers, via Rennes. Lors de leur embarquement, beaucoup de Fougerais sont rassemblés sur la place et chantent la Marseillaise. Les Allemands les repoussent.

Gérald Gallais est libéré immédiatement faute de preuves. IL sera arrêté en octobre 1944, déporté et il mourra avant d’avoir atteint ses 19 ans.
. . Beaucoup de membres du groupe sont relâchés de la prison « Le Pré Pigeon » à Angers, faute de preuve. Il ne reste plus alors que quatorze détenus. Huguette Gallais a 20 ans en Novembre dans cette prison.
. . . En novembre 1941, les femmes sont transférées à la prison de la Santé, les hommes à la prison de Fresnes à Paris. Le 18 décembre, ils sont envoyés à la prison d’augsburg en Allemagne.Il y a un quartier pour les hommes et un pour les femmes.
. . Joseph Brindeau, tuberculeux, meurt le 30 mars 1942 à l’hôpital d’augsburg.
Théophile Jagu, dit « le gendarme » est libéré, faute de preuve et grâce au silence de ses camarades. Il rentre à Fougères mais un doute plane sur lui du fait de sa libération. Heureusement, Andrée et Huguette Gallais peuvent témoigner de son attitude irréprochable dans la Résistance, quand elles rentrent en 1945.
. . Andrée Gallais et Louise Pitois restent dix-huit mois au secret, dans des cellules individuelles, le temps de l’instruction. Huguette Gallais y reste 21 mois. Pour tenir, elle fait de la gymnastique et elle prie.
. . Les douze membres du groupe Gallais sont déférés devant le tribunal de d’Augsburg avec des jurés venus de Berlin, le 23 février 1943. La présidence est assurée L’audience est pénible. Elle dure de 9 heures à 21 heures 30. Ils sont tous condamnés à mort et transférés à la prison « Stadelheim » de Munich, le 9 septembre 1943. C’est au cours de ce transport qu’ils se verront pour la dernière fois.

Le 21 septembre 1943, 8 hommes du groupe sont guillotinés. Il s’agit de : René Gallais, Raymond Loizance, Marcel Pitois, Antoine Perez, Louis Richer, François Lebosse, Jules Rochelle et Jules Frémont.

Quoique condamnés comme les autres, Andrée Gallais, Huguette Gallais sa fille, Louise Pitois et Marcel Le Bastard ne sont pas exécutés mais déportés comme NN (Nacht und Nebel = Nuit et Brouillard).
Marcel Le Bastard survit et revient à Fougères ainsi qu’Andrée et Huguette Gallais. Louise Pitois meurt du typhus le 10 mai 1945 après avoir vu la libération du camp par les Anglais.
Tous les membres décédés du groupe Gallais ont reçu la légion d’Honneur, la croix de guerre et la médaille de la résistance à titre posthume.

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LES CONVOIS vers les prisons du REICH partis en DECEMBRE 1941 Dans le cadre de l’Opération “ PORTO”

L’opération “Porto” désigne une série d’arrestations menées par l’Abwerh, service de contre- espionnage du Haut Commandement des Forces armées allemandes, arrestations effectuées entre juin 1941 et août 1942 particulièrement dans la zone Nord occupée, la plupart des arrestations étant toutefois opérées au cours du mois d’octobre 1941.

Cette opération s’inscrivait dans la politique répressive menée après le 22 juin 1941, jour de l’attaque contre l’Union soviétique.

Dans les pays occupés, étaient prises des mesures préventives contre les militants communistes mais aussi les juifs, au nom de la lutte contre le judéo-bolchevisme, lutte à laquelle s’associait le gouvernement de Vichy.

La répression visait aussi les groupes de résistants qui étaient en liaison avec Londres, et notamment les réseaux Hector et Saint-Jacques dans lesquels un agent double avait pu s’infiltrer.

Le réseau Hector a été créé par le colonel Groussard alias Gilbert qui s’était fait mettre en congé d’armistice par Vichy, et nommer inspecteur général de la Sûreté nationale. Au début de septembre 1940, se chargeant lui-même de la zone sud, il remettait des fonds à son ami le colonel Heurteaux afin de constituer un réseau en zone occupée.

Ce dernier recrutait le commandant René Grard, rentré en mai 1940 de Belgique où il dirigeait une tannerie à Zulte et devenu depuis peu directeur régional du « Centre des maisons d’accueil des anciens combattants ».

A Vannes, Grard était mis en relation en octobre, par son beau-frère Salomon Boisecq, avec le commandant Muller, qui à son tour, recrutait une dizaine d’hommes qui commençaient à recueillir des renseignements, permettant de communiquer les mouvements des troupes ennemies, leurs installations de l’ennemi, les mouvements des sous-marins, ces renseignements étant transmis par René Grard au S.R. « Air » de Vichy qui les communiquait à Londres.

Dès septembre 1941, les services secrets de l’armée allemande apprenaient par l’un de leurs agents infiltrés dans le réseau Hector que des membres envisageaient de commettre des attentats.

D’où la mise en place à partir du 9 octobre 1941 d’une opération coordonnée d’arrestations sur tout le territoire national ayant pour nom de code « Fall Porto ». 119 personnes étaient arrêtées 42 étaient relâchées, aucune preuve n’ayant pu être réunies contre elles.

Dans cette même opération plusieurs membres du réseau Saint-Jacques créé par Maurice Duclos tombaient entre leurs mains.

Nous ignorons, pour la plupart des personnes dont les noms suivent, si elles appartenaient aux réseaux Hector et Saint Jacques.

Le 10 décembre 1941, les 102 premiers arrêtés de l’ opération « Porto » étaient déportés vers les prisons de Düsseldorf pour 45 d’entre eux, vers la prison d’ Essen, pour les 57 autres .

Le 15 décembre 1941, 89 prévenus étaient déportés à leur tour, 54 d’entre eux étaient incarcérés dans la prison de Wuppertal, les 35 autres dans celle de Hagen.

Le 19 décembre 1941, 36 prévenus étaient déportés dans les prisons de quatre villes différentes et éloignées des précédentes, 14 à Wiesbaden, 5 à Bad- Kreuznach, 14 à Augsburg et 3 à Regensburg.

Enfin, le 22 décembre 1941, 4 prévenus étaient déportés et incarcérés dans la prison de Nuremberg.
Sur les 212 hommes et les 19 femmes déportées vers les prisons du Reich au cours de ce mois de décembre 1941, 89 personnes bénéficieront de libération “anticipée” pour insuffisance de charges, notamment le 15 août 1942 et courant 1943, 33 personnes au moins ont été condamnées à mort et exécutées, à l’exception des femmes condamnées à mort déportées en KL.

Les autres condamnés étaient transférés vers les divers camps de concentration avec le statut NN. Dans ces différents convois se trouvaient au moins 16 personnes originaires de Bretagne Parmi ceux ayant bénéficié d’une libération anticipée se trouvaient

Jean BEAUFRERE, né le 25.12.1906 à Quimperlé (29) libéré le 16.12.1943, René DECKER, né 18.09.1889 à Vannes ( 56), libéré le 15.08.1942, Yves FLOCH, né 08.06.1899 à Rosnoen (29), libéré le 15.08.1942, Joseph LE BIANNIC, né 03.09.1899 à Tréguier(22), libéré le 15.08.1942, Paul LE FLEM, né 07.10.1908 à Pont Labbé (29), libéré le 15.08.1942, Guillaume LE GUERN, né 12.10.1912 à Pleumeur Gautier (22), libéré le 15.08.1942, Francis TROCHET, né 28.05.1904 à Mélesse (35), libéré le 15.08.1942,

Parmi les condamnés à mort, ont été exécutés à Munich le 21.09.1943 par décapitation aux heures suivantes selon le rapport d’exécution:

à 17 h 05 René GALLAIS, né le 16.03.1891 à Pleugeneuc (35): il avait 52 ans à 17 h 08, Raymond LOIZANCE, né le 16.10.1919 à St Hilaire (35): il avait 24 ans à 17 h 11, Marcel PITOIS, né le 12.03.1912 à ?: il avait 31 ans 17 h 14, Antoine PEREZ, né le 24.02.1911 à La Ferrière (35): il avait 32 ans à 17 h 16, Louis RICHER, né le 04.05.1923 à ,?: il avait 20 ans à 17 h 19, François LE BOSSE, né le 07.12.1901 à ?: il avait 42 ans à 17 h 21, Jules ROCHELLE, né le 24.05.1898 à Fougères (35): il avait 45 ans à 17 h 24, Jules FRÉMONT, né le 19.07.1891 à Broualan (35): il avait 52 ans

Selon les informations diffusées sur le site des Anciens Combattants d’Ille et Vilaine: memoire de guerre, dès la fin 1940, René Gallais, capitaine au long cours, gardien du château de Fougères où il demeurait avec sa femme Andrée, née le 08.09.1898, sa fille Huguette née le 07.11.1921 et son fils Gérald, organisait un groupe de patriotes avec des membres de sa famille et des amis tels Deschamps, la famille Huet, Raymond Loizance, Louis Richer, Antoine Perez, Le Bastard, Jules Frémont et François Le Bosse. Ces

résistants aidaient des jeunes gens à passer en zone libre et en Angleterre, et faisaient parvenir à Londres, des renseignements sur les troupes allemandes et leurs déplacements.

En liaison avec l’Intelligence Service et le BureauCentral de Renseignements et d’Action à Londres, le groupe hébergeait aussi des agents et des parachutistes .

Compte tenu du développement du réseau, René Gallais et Jules Frémont étaient désignés pour diriger deux unités combattantes l’une sur Fougères, l’autre sur Saint-Brice en Coglés.

Mais des autonomistes bretons, agents de l’Abwehr s’étaient infiltrés dans le réseau et en dénonçaient les membres, dénonciation qui conduisait à l’arrestation, dans la nuit du 8 au 9 octobre 1941, de René Gallais, de sa femme Andrée, et de sa fille Huguette, et de plus de 50 membres du réseau, dont 14 restaient détenus à la prison d’Angers avant d’être transférés, pour les hommes à la prison de Fresnes, puis à celle d’Augsburg en Bavière, pour les 3 femmes Andrée et Huguette Gallais, et Louise PITOIS, née le 20.10.1904 à Fougères, à la prison de la Santé, puis à la prison de Kastell- Stadel. Après leur procés elles étaient transférées au camp de Ravensbrück, bloc 32 des NN, puis à Mauthausen

Andrée et Huguette GALLAIS revenaient de déportation, en revanche Louise PITOIS décédait à Bergen Belsen, le 10.05.1945, quelques jours avant son rapatriement, elle avait 41 ans.

Voici le récit donné par Huguette GALLAIS

-de l’interrogatoire subi dans les geôles de la Gestapo

« Nous avons été interrogés par la Gestapo en juin 1942. Ils m’ont frappée devant Frémont pour le faire parler, lui. C’était un père de famille de cinq enfants. Il habitait Saint-Brice, un bourg où j’avais accompagné un transport d’armes, et les Allemands voulaient en savoir davantage à ce sujet. Nous avions caché les fusils chez Armand Laize, mais celui-ci n’a pas été arrêté, pas plus que les autres membres de sa famille. Frémont et moi étions horriblement esquintés, cependant aucun de nous deux n’a parlé. J’ai été ramenée à la prison, je ne sais pas comment parce je me suis réveillée sur un bat-flanc, souffrant de partout. Celui qui m’avait interrogée était un nazi nommé Steinler.

Les interrogatoires terminés, maman et Mme Pitois étaient montées avec des droits communs allemandes. Comme maman était modéliste en haute couture, elle a été placée dans un atelier de couture au service des surveillantes, où elle cousait des punaises dans les ourlets des robes pour casser le moral des Allemandes qui emportaient cette vermine dans leurs maisons. »

– du déroulement du procès, le 23 février 1943 dans la salle des Assises du Tribunal Régional, à Alten Einlass

« Lors du procès, nous avons enfin pu échanger quelques mots furtifs avec papa et les autres hommes, que nous n’avions pas vus depuis notre arrestation.

Nous n’étions plus que douze accusés. Joseph Brindeau ( né le 14.04.1919), tuberculeux, était décédé [ le 30.03.1942, il avait 23 ans] à la prison d’Augsburg et Théophile Jagu ( né le 14.02.1900 à Maure(64), un gendarme qui nous renseignait, avait été libéré et renvoyé à la brigade de Fougères, faute d’éléments contre lui.

Nous avions soutenu jusqu’au bout que nous ne le connaissions pas. Seulement, rentré en Bretagne, les autres familles de déportés ont cru qu’il nous avait dénoncés. Il a été bien soulagé de voir maman et moi revenir vivantes pour démentir.

Quel dommage que le procès n’ait pas été filmé ! Toutes les armes étaient là : Terre, Mer, Air. Ils nous avaient commis quatre avocats d’office.

Parmi eux, un antinazi, le docteur Reiseirt, qui, lui, a vraiment plaidé. Sa plaidoirie disait, en substance, que papa avait fait la guerre 14-18, tout comme lui, et peut-être s’étaient-ils trouvés face à face dans les tranchées mais chacun défendait son pays et faisait son devoir.

Nous fumes tous les douze condamnés à mort, mais les trois femmes furent envoyées en camp de concentration ainsi que Marcel Le Bastard, [né le 18.10.1922 à Gennevillliers 72) . Marcel était étudiant à Rennes, où il avait déjà été arrêté, et le dossier le présentait comme un hurluberlu, incapable d’appartenir à un réseau d’envergure. [ sa peine est commuée en travaux forcés, il est transféré à Sonnenburg puis et enfin à Heinkel.

Il rentrera de deportation en 1945.

Le docteur Reisert a obtenu d’un gardien que les hommes restent ensemble jusqu’à leur exécution. Ils ont veillé, ils ont prié. Ils ont reçu la communion. »

. En 1950,la ville de Fougères organisa le retour exceptionnel des corps d’Allemagne en présence d’un détachement militaire et de nombreuses personnalités
Une veillée funebre eut lieu en l’église St Sulpice. L’inauguration du monument a eu lieu en 1952

Ils reçurent tous à titre posthume
La Légion d’honneur, la croix de guerre avec palme et la médaille de la résistance.