FOLKE Harald

Auteur de la fiche : Anise Postel-Vinay

Harald Folke

Le Suédois Harald Folke est né en 1915. Militaire de carrière, était sous-lieutenant depuis 1937 lorsqu’il se porta volontaire pour soutenir la vaillante armée finlandaise lors de l’attaque massive des Soviétiques sur les pays baltes en 1940. Il s’acquitta ensuite de plusieurs mis­sions militaires durant cette période troublée où, à partir de juin 1941, les Allemands ne cessèrent de se battre contre les Russes à l’extrême-nord de la Finlande.

Au début de 1945, un diplomate norvégien attaché à la légation de Norvège de Stock­holm suggéra au gouvernement suédois de tenter de sauver les détenus politiques et juifs d’origine scandinave. Le gouvernement acquiesça et confia au frère du Roi, le Prince Charles, président de la Croix-Rouge sué­doise, le soin de procéder à la négociation.

Pour cette mission difficile, le Prince Charles eut recours à son neveu, le Comte Folke Ber­nadotte. Celui-ci obtint d’Eisenhower d’une part, du Reichsführer Himmler d’autre part (cette dernière négociation eut lieu à 12 km de Ravensbrück, dans la clinique du professeur S.S. Gebhardt, l’auteur des expériences pseudo-médicales du camp), l’autorisation d’aller chercher les prisonniers scandinaves dans leurs divers lieux d’internement en Alle­magne. Le Comte Folke Bernadotte fut nommé commandant de la mission de sauve­tage et recruta, entre autres, le lieutenant Harald Folke qui fut chargé de diriger les convois d’autobus blancs de la Croix-Rouge, sous l’œil peu amène de trente hommes de la Gestapo qui suivaient les convois partout.

De Friedrichsruhe, quartier général de la Croix-Rouge suédoise installé dans le châ­teau des Princes de Bismarck, la première expédition alla jusqu’à Dachau et There­sienstadt d’où elle ramena plusieurs centaines de détenus. Ceux-ci durent, dans un premier temps, être rassemblés au camp de Neuen­gamme. Là, Folke découvrit, « dans un coin », disait-il, un lot de détenus français incarcérés sous un régime d’otages.

Il les signala à son chef, le Comte Bernadotte qui, depuis des semaines, négociait âprement avec Himmler le transfert des détenus scandinaves vers la Suède. En souvenir de son ancêtre français (le Maréchal de France Charles Ber­nadotte, de Pau, était devenu roi de Suède et de Norvège en 1818 sous le nom de Charles XIV), le Comte Bernadotte inclut le sort de ces Français de Neuengamme dans la négociation et obtint qu’ils soient transférés non loin de la frontière suisse. Le lieutenant Folke retraversa l’Allemagne du nord au sud, en plein chaos, pour se retrouver… aux portes de Flossenbürg ! Folke n’apprécia pas le piège et réussit à ramener ses Français à Theresien­stadt où il sauva le convoi en saoulant le commandant du camp.

La mission suivante concerna les Françaises et les Anglaises de Ravensbrück qui, en deux convois, à deux jours de distance, furent conduites au Danemark et en Suède les 23. et 25 avril 1945. Quand Folke retourna à Rave brück le 25 avril, avec ses chauffeurs harassés, il arracha au commandant du camp Suhren quatorze Françaises retenues en otage, dont une rescapée du 23 avril lui avait donné la liste. Le 26 avril, Folke réussissait à trouver un train entier pour amener encore un millier de Polo­naises au Danemark. Les trajets en « bus blancs » se faisaient sur des routes encombrées de réfugiés et de ruines, sans cesse bombardées par les Américains et les Russes. Une Française et un chauffeur suédois furent tués, mais un bébé naquit dans un bus !

La Croix-Rouge suédoise sauva ainsi 25 000 détenus des camps de concentration.

Si Himmler avait accepté ces libérations, c’est parce qu’il espérait que les Suédois lui ménageraient un contact avec Eisenhower pour négocier une paix séparée et un retour­nement des Alliés contre les Soviétiques, aux côtés de l’armée allemande ! Ces négociations et ces libérations furent menées à l’insu d’Hitler dont on imagine la fureur quand il apprit, par la radio, qu’Himmler avait osé prendre contact avec les Alliés et qu’il avait été bien évidemment éconduit.

Après la guerre, le capitaine Harald Folke participa aux interventions de l’O.N.U. dans ses processus de paix au Congo en 1961 et à Chypre en 1964, comme officier au sein des forces d’intervention suédoises.

Dès sa retraite, le colonel Folke choisit de venir s’installer en France avec sa femme et ses jeunes enfants. Il y vécut jusqu’à sa mort, dans un petit village du Périgord, entouré de l’amitié de ses voisins et de l’affection indé­fectible des anciens de Neuengamme et de Ravensbrück.

En 1947, le capitaine Folke a reçu les plus hautes décorations de la plupart des pays d’Europe.