GOUSSARD Yves

Buckmaster

Auteur de la fiche : François CARTIGNY

GOUSSARD Yves

Yves GOUSSARD est né à Fort de France (Martinique) le 2 janvier 1928 dans une famille très cultivée de la bourgeoisie mulâtre de l’île. Son grand père maternel est ingénieur des travaux publics; son grand oncle est le premier agrégé antillais de lettres. En septembre 1938, alors âgé de 10 ans, il quitte la Martinique pour faire son entrée en sixième dans un établissement scolaire de la Métropole: l’école catholique Notre-Dame du Raincy, en région parisienne,  alors en Seine et Oise, arrondissement de Pontoise. Il ne sait pas qu’il ne reverra plus

jamais ses parents ni son île natale. L’école est dirigé par M. Jacques Guiollot, qui était aussi pour le région Seine-et-Oise Est, commissaire de district des scouts de France. Le jeune Yves fut immédiatement intégré dans la troupe du Raincy. Arrive la guerre et avec l’occupation de la « zone nord » le scoutisme est interdit par les autorités allemandes. Qu’à cela ne tienne, les réunions se tiendront clandestinement. En 1943, nombreux sont les jeunes gens, issus du scoutisme, qui en âge d’être requis pour le Service du Travail Obligatoire en Allemagne prennent le maquis. Yves Goussard qui a eu 15 ans au début de l’année est maintenant « routier » du clan de Villemomble, la commune voisine du Raincy. Jean Berthier, le père de son camarade Guy Berthier, de Montfermeil, résistant du réseau Vengeance a été arrêté par le Gestapo et déporté à Buchenwald le 25 juin 1943. Dans la tête de nos jeunes gens l’idée de rejoindre un réseau de résistance commence à germer.

Le 5 février 1944, deux membres du réseau Buckmaster, venant d’Angleterre, sont parachutés dans la région de Dreux (Eure-et-Loir), à Laons, avec pour mission de prendre contact avec un noyau de résistants de le région Nord-est de Paris, le groupe Hildevert, afin de l’aider à se structurer. Ce sont

René Dumont-Guillemet et son radio Henri Diacono, âgé de 20 ans. Ils formeront le réseau « Armand-Spiritualist » qui regroupera plusieurs dizaines de résistants du Raincy et de ses environs.

Charles Hildevert, un ancien de 14-18, maréchal des logis-chef retraité, marchand de légumes au Raincy  adhère immédiatement au réseau Armand Spiritualist avec tous ses hommes, au nombre desquels se trouve le jeune Yves Goussard qui est agent de liaison et de renseignements.

Le 26 août 1944 Paris est libéré par les soldats de Leclerc, les forces de la Résistance et l’armée américaine, mais à l’Est de la capitale les combats continuent avec fureur. Le groupe du commandant Hildevert s’oppose dans la région de Meaux à une division blindée SS et à Oissery, Forfry et Saint Pathus, c’est le carnage. Yves Goussard, blessé à l’étang de Rougemont, soigné à la râperie à betteraves d’Ossery par la jeune et courageuse Jeanne Lefebvre, infirmière de la Résistance, âgée de 20 ans, est capturé avec une douzaine d’autres combattants dont Raymond Valenet, de Gagny. Ceux-là seront déportés en Allemagne. Sur le terrain, la Résistance laissera plus de 120 morts, douze disparus et autant de victimes non identifiées qui ont été réduites en cendre par les lance-flammes des allemands rendus fous furieux par cette résistance à laquelle ils ne s’attendaient pas.Yves Goussard est enfermé à Meaux, dans un train parti la veille du Perreux-sur- Marne. Train qui le conduira avec plus de 50 autres déportés dans le camps de Neu-Bremm, à Sarrebruck sur la frontière franco-allemande. De là, il sera transféré à Oranienbourg-Sachsenhausen près de Berlin, puis, début février 1945, à Bergen-Belsen où sévit la deuxième grande épidémie de typhus. Au cours du mois de mars il y trouve la mort, victime à son tour de la terrible épidémie. Raymond Valenet qui assistera à son agonie rentrera des camps en mai 1945. De même que Michel Fliecx, mort en mars 2007.

Vingt ans plus tard, Raymond Valenet, maire de Gagny, député UNR de Seine-et-Oise, au cours d’un voyage à la Martinique demande à rencontrer la mère d’Yves Goussard. C’est lui qui révélera à la malheureuse maman la fin tragique de son fils à Belsen en mars 1945.

Le tribunal de grande instance de Fort de France sera alors saisi d’une demande de déclaration judiciaire de décès. Le 31 juillet 1965, le jugement rendu reconnaîtra l’appartenance du jeune homme au réseau Buckmaster, sous-réseau Armand Spiritualist; sa capture à Oissery (Seine-et-Marne) le 26 août 1944, sa déportation et sa mort « Pour la France » à Bergen-Belsen, courant mars 1945. Il avait 17 ans.

Par arrêté du secrétaire d’Etat à la Défense, chargé des Anciens Combattants, en date du 12 juillet 2007, publié au Journal Officiel du 7 août suivant (page 13225), la mention honorifique « mort en déportation » sera attribuée à Yves Goussard, le plus jeune de tous les déportés originaires de la

Martinique.

Le 5 avril 2008, à Riaumont, commune de Liévin (Pas-de-Calais), dans le crypte de la chapelle du Mémorial national de Scouts morts pour la France, une plaque commémorative était solennellement

dévoilée en hommage au jeune martyr de la Résistance, en présence des plus hautes autorités civiles, religieuses et militaires du département et de plus de 150 scouts, louveteaux et louvettes en grande tenue d’uniforme.