JEGOU Ferdinand
Auteur de la fiche : Huguette JEGOU
Ferdinand JEGOU
En 1942, termine un engagement de 5 ans dans la Marine Nationale qu’il avait signé à18 ans à Lorient. Dans un premier temps, il sert à la base aéronautique de Rochefort. A la débâcle de, 1940, toutes les unités se replient vers Hourtin en Gironde et Cuers Pierrefeu à Toulon
Après le sabordage de la flotte à Toulon, départ pour Dakar jusqu’en 1942 en qualité d’agent technique pour finir les 5 ans. II rentre donc en France en juin 1942 et trouve refuge dans une famille amie de Clermont-Ferrand car il ne veut surtout pas rentrer en zone côtière occupée par les Allemands, ni chez lui en Bretagne, ni en Charente Maritime où nous devions nous marier. Alors je passe la ligne de démarcation en fraude près de La Rochefoucauld et après notre mariage célébré à Limoges chez d’autres amis, nous partons habiter à Clermont –Ferrand où Ferdinand avait trouvé du travail à l’Atelier Industriel de l’Air à Aulnat (AIA).
En mars 1943, les Allemands ayant envahi la zone libre, il est désigné pour le S.T.O. Ne voulant pas partir, il me ramène dans ma famille à Saint-Hippolyte pour attendre notre première fille et il repart pour le maquis d’Auvergne pour recevoir fausses identités et intégrer le réseau Mithridate. Par la suite, il est muté en Charente Maritime en qualité d’agent permanent pour parcourir le département et signaler des endroits favorables à d’éventuels parachutages d’armes pour les nombreux groupes de résistance qui travaillaient dans la région. Il était donc agent de liaisons du réseau Mithridate du Bordelais et de la Charente Maritime. Il devait également fournir des rapports sur l’activité des troupes allemandes dans la région et servir d’intermédiaire avec un autre Résistant, Henri THOMAS qui travaillait à la base sous marine de La Pallice et se procurait de précieux renseignements sur les entrées et sorties des bâtiments et sous marins allemands. Ces notes étaient déposées chez un troisième agent M. Gaston GAILLARD, qui travaillait à La Rochelle, et servait de « boite à lettres » où Fernand JEGOU allait régulièrement les récupérer.
A la maison, moi-même, son épouse, je les recopiais avec une encre spéciale invisible fabriquée à partir d’un médicament et il les transportait deux fois par semaine à Bordeaux. Les textes étaient transmis à Londres à l’aide d’appareils cachés dans un appartement (près de la gare Saint Jean à Bordeaux) disposant d’une cave où les différents agents de liaison apportaient leurs renseignements pour les forces françaises combattantes. Ces appareils « radio » étaient très recherchés par des véhicules allemands équipés d’un système goniométrique qui avaient une antenne orientable sur leur toit et quadrillaient zone par zone les lieux possibles d’émission afin que la Gestapo les repèrent pour les arrêter. Ces rendez-vous d’agents avaient lieu dans cet appartement qui comptait un cabinet de guérisseur qui semblait recevoir des « malades » en consultation, ce qui justifiait les allées et venues des résistants. Ce travail a duré jusqu’au 14 janvier 1944, date à laquelle Gaston GAILLARD et son épouse ont été arrêtés. Mme GAILLARD a été libérée vers le 19 janvier 1944 mais Henri THOMAS et Ferdinand JEJOU ont été arrêtés le 17 janvier après que tout le réseau ait été démantelé à cause d’un traître qui les a vendus. Henri THOMAS vit encore, mais étant très âgé, a perdu une grande partie de sa mémoire. M. GAILLARD et tous les autres sont restés emprisonnés à Lafond La Rochelle jusqu’au 16 mai 1944, jour de leur départ pour Compiègne et Neuengamme.
Nous les épouses, qui avions droit de visite toutes les deux semaines pour apporter nourriture et linge propre et reprendre le sale, sans rencontrer les détenus, savions que Gaston GAILLARD ne survivrait pas à la déportation car il pleurait souvent et ne mangeait pas. Il était déjà âgé à l’époque et ne pouvait résister aux J séances de torture qu’il subissait ; son corps était devenu une immense plaie et il couchait sur une civière.
Il est décédé à Neuengamme mais a pu confier à un ami commun, le Docteur Michel BOUCHER, qu’il allait mourir satisfait de son « travail » de Résistant avec ses agents de liaison car il avait réussi, grâce aux j rapports sur la base sous marine, à faire couler 8 sous marins et bâtiments de guerre allemands. Ferdinand JEGOU, parti lui aussi en wagon plombé pour le camp de concentration de Neuengamme a réussi à jeter depuis le train un petit billet griffonné à la hâte, ce qui m’a permis de savoir qu’il était vivant et en route vers l’est, pour une destination inconnue. Quand, en avril 1945, les anglais ont libéré les détenus, il était encore vivant. J’ai été avertie de son retour alors que j’assistais à la remise des prix à l’école communale de St Hippolyte.