Dupont Andrée
Auteur de la fiche : Jacques Chesnier Délégué dans la Sarthe de l'Association des Amis d la Fondation de la Résistance
DUPONT Andrée
Née le 06 août 1927 à Assé-le Boisne où sa mère Marie-Louise est aubergiste, son père André étalonnier, sa tante et marraine Louise épicière. La guerre de 14-18 a profondément marqué la famille (son grand-père en particulier).
Dès 1940, la guerre est visible à Assé avec la présence de soldats anglais mais l’occupation allemande, la politique de Pétain, choquent profondément toute la famille qui de résistante dans l’âme agit régulièrement dans le cadre d’un réseau dès que l’occasion se présente à la mi 1943 grâce à Edouard Paysant relayé par la suite par Camille Delétang. Ces derniers sont chargés, dans le cadre stratégique et tactique du futur débarquement d’organiser des terrains de parachutages. Le groupe ainsi constitué est l réseau Action du Bureau des Opérations Aériennes(BOA).
Une équipe est constituée à Mont-Saint-Jean (« Ouragan ») autour de Louis Lefèvre, une autre à Assé-le-Boisne (« Haine »). Les membres très actifs de ces équipes sont les familles Lefèvre (Louis père et fils), Harang… pour « Ouragan », Dupont (Louise, Marie-Louise, Andrée, André, Louis), Derenne (Georges père et fils, Bernard, Marcel), Quinton (André et Jean-Baptiste), Demelle, Tournelle, Vital Soyer pour « Haine ». Pour l’année 1943, les armes sont d’abord stockées chez la famille Brière de Montreuil-le-Chétif. (Ces derniers appartiennent au réseau Pascal Sacristan du SOE) puis dans les environs après l’arrestation de ces derniers.
Tout le monde se connait. De plus René Brossard autre Asséen résiste dans l’Orne comme FTP à côté d’Argentan avec son frère. (Arrêté quelques jours avant le réseau BOA, il est fusillé en juillet 1944)
Le 26 avril 1944 les dix-sept membres du réseau sont arrêtés (sa mère et son frère y échapperont mais aussi Marcel Derenne, miraculeusement, grâce à André Quinton) et déportés. Andrée Dupont « Dédée », agente de liaison a alors un peu plus de 16 ans.
Tabassés sévèrement dans l’école, ils sont emmenés et emprisonnés à la prison de la Sipo-SD des Archives du Mans puis les hommes sont emmenés à Compiègne et les femmes à Romainville, en car. Le convoi de Dédée avec Marcelle Demelle, Marie Harang, Louise Landais part de la gare de l’est et arrive le même jour dans le camp disciplinaire de Neue Bremm le 12 juin 1944. Elle est transférée à Ravensbrück le 25 juin 1944 (matricule 43 129 dans le block 32). Environ un mois après elle part à Leipzig pour le kommando Hasag (usine de fabrication de munitions et de panzerfausts) dépendant de Buchenwald. Isolée, désespérée, séparée de sa marraine restée à Ravensbrück, Dédée a la vie sauvée par Lise London qui devient sa « mère de camp » et la protège. La solidarité entre déportées est capitale dans les camps. En avril-mai 1945, elle participe aux sinistres marches de la mort et rentre fin mai 1945 mais sa tante Louise Landais (matricule 43 141) « Marraine » qu’elle aimait beaucoup a été gazée le 1er mars 1945. (Dédée ne le saura que vers 1995) .Son père André déporté à Neuengamme avec les hommes du groupe meurt des suites des mauvais traitements subis en déportation peu après son retour. Elle ne se sent revivre que lorsqu’elle voit le clocher de l’église d’Assé. Pas avant.
Les difficultés et douleurs liées à la déportation ne s’effaceront jamais. Il faut vivre avec des images et des cauchemars sans être compris. Alors comme beaucoup de déportées, elle se tait. A partir des années 1995, à l’initiative d’une de ses petites filles qui veut « savoir », d’un professeur d’histoire, de l’ONAC, très progressivement, elle témoigne alors inlassablement dans de nombreux établissements scolaires et son vécu s’inscrit dans l’organisation résistante et dans l’Histoire. Elle n’a pas cessé depuis avec le mot « Tolérance » comme leit motiv.
En 2015 elle revient à Ravensbrück, et réalise son souhait d’aller à Neuengamme .Elle peut enfin faire le deuil de sa marraine au pied des fours crématoires et du lac.
Photo : Andée Dupont à 18 ans en 1946