Brouard Albert

Pat. O'Leary

Auteur de la fiche : MICHEL BLONDAN Sources : SHD-BR, 16P 92881 (dossier individuel) et 17P 82 (réseau FFC Base Espagne/Brett-Morton).

Albert Brouard

Est né le 4 décembre 1903 à La Romagne (Maine-et-Loire), est le fils d’Auguste Jules Brouard et de Marie Monique Legrand. Au sortir de l’enfance, il cesse ses études avec, en poche, le certificat d’études primaires, puis au terme de l’adolescence, il s’engage pour trois ans au 1er régiment de zouaves, en garnison à Casablanca.

En 1924, rapatrié du Maroc, il est affecté au 135e RI à Angers avant de devenir sergent instructeur au Prytanée militaire à La Flèche(Sarthe).

Le 8 septembre 1925, il se marie avec Suzanne Lointier. De leur union naîtra, en 1932, Annette. Entre-temps, en janvier 1927, il s’est rengagé, rejoignant, cette fois, le 5e RI à Paris. Breveté pionnier en 1928, il est admis à faire valoir ses droits à une retraite proportionnelle le 1er juin 1937, avec le grade d’adjudant chef.

L’ordre de mobilisation générale du 1er septembre 1939 rappelle Albert

Brouard à l’activité, et il est affecté spécial à la Préfecture de Police, comme gardien de la paix, avant d’être promu inspecteur de police judiciaire, breveté de police technique et de portraits parlés.Il habite Courbevoie (Seine). Contacté par Louis Albert Lebon, officier de police au commissariat des Ternes,

Albert Brouard adhère, en septembre 1940, au Coq gaulois et s’implique notamment dans la confection de fausses cartes d’identité et l’évasion de prisonniers désireux de rejoindre la zone non occupée.

Le 22 janvier 1941, il est arrêté – dit-il lui-même – par le commissaire Martz, à la suite d’une dénonciation de Prenestini et Rondet. Le lendemain, il est livré aux Allemands. Et le 22 mai 1941, il est jugé avec douze de ses compagnons du Coq gaulois par un tribunal militaire allemand siégeant rue Saint- Dominique à Paris, qui le condamne à 13 mois d’emprisonnement, outre ceux de prévention – la date de sa libération étant fixée au 23 juillet 1942 – pour «activité illicite en matière d’association et détention illicite d’armes ».

Albert Brouard est écroué successivement à La Santé, au Cherche-Midi, puis à Fresnes et Troyes avant d’être transféré au Fort de Hauteville-lès-Dijon, gardé par des Allemands et où il exerce les fonctions de comptable puis d’adjoint au vaguemestre, avant de parvenir à s’en évader le 9 janvier 1942.

Révoqué de ses fonctions d’inspecteur de police, Albert Brouard confirme sa volonté de continuer la lutte contre l’occupant. Le 15 janvier 1942, il franchit la ligne de démarcation aux environs de Loches (Indre-et-Loire) puis va à ;Marseille pour nouer le contact avec le réseau Pat O’Leary. Grâce à cette filière d’évasion vers l’Espagne, Albert Brouard franchit clandestinement la frontière le 9 avril 1942 aux environs de Cerbère (Pyrénées-Orientales) et rejoint le consulat britannique à

Barcelone le 10 avril 1942. Le 1er mai 1942, il s’engage au titre des Forces françaises libres.

Le BCRA de Londres le détache à l’ambassade de Grande-Bretagne à Madrid. Devenu chef du poste évasions de l’antenne clandestine de

Madrid du BCRA, Albert Brouard, connu désormais sous le pseudo d’Albert Brett, a pour mission de filtrer les volontaires français qui transitent par l’Espagne et d’aider à leur évacuation vers l’Angleterre ou l’Afrique du Nord, en s’efforçant de les soustraire aux geôles franquistes. En octobre 1942, un autre agent du BCRA lui est adressé. Il s’agit de Roger Mitchell, alias Morton. Ils vont alors travailler de concert pendant plus d’un an. Cette étroite coopération de Brett et de Morton explique pourquoi cet organisme de résistance a été homologué à la Libération sous le nom de Brett-Morton, une dénomination permettant de le distinguer clairement parmi les autres composantes de Base Espagne (une structure regroupant une dizaine de réseaux et sous-réseaux d’action, de renseignement militaire et d’évasion relativement autonomes mais ayant en commun l’emploi d’agents français ou alliés œuvrant depuis juin 1942, au sein de la population espagnole, avec le dessein d’organiser des voyages clandestins de personnalités ou de chefs de réseaux, quand ce n’est pas le rapatriement d’aviateurs alliés ou l’acheminement de colis spéciaux ou de courriers secrets). En janvier 1944, apprenant qu’il est recherché par les services espagnols, Brett quitte Madrid pour rejoindre l’Afrique du Nord, via Gibraltar, d’où il s’envole le 17 février 1944.  D’Alger, le BCRA affecte Albert Brouard au Maroc en qualité de chef d’antenne chargé du contre-espionnage, à compter du 1er mai 1944. Sa mission terminée, il retourne à Alger d’où il s’envole, le 1er août 1944, cette fois à destination de l’Italie, avec le premier échelon de sécurité militaire.

Le 17 août 1944, il débarque à Cavalaire (Var) avec les premiers éléments de la 1re Armée. L’ancien gardien de la paix, maintenant officier de renseignement et chef enquêteur, rejoint la DGSS/DGER, sécurité militaire, à Paris le 2 septembre 1944. Le 20 juillet 1945, il est démobilisé et se retire à Courbevoie. Il est réintégré au sein de la police en qualité d’inspecteur principal. Il prend sa retraite en 1968 comme commissaire

 Albert Brouard s’éteint le 20 mai 1980 à Doué-la-Fontaine (Maine-et-Loire).

 Les activités d’Albert Brouard dans la Résistance lui valent reconnaissance, droits et récompenses. Les services qu’il a accomplis en France occupée sont homologués au titre du réseau FFC Brett-Morton, du 21.1.41, veille de son arrestation, au 9.4.42, jour de son franchissement des Pyrénées. Pour la même période, les qualités d’agent P2 et de chef de mission de 2e classe, avec le grade assimilé de commandant, lui sont officiellement reconnues. Au-delà dudit 9 avril

1942, ses services étant accomplis hors du territoire occupé par l’ennemi, Albert Brouard ne peut jouir, au regard de la législation, des mêmes avantages, c’est pourquoi il bénéficie d’une promotion au grade réel de sous-lieutenant de réserve (rang du 1.05.42), suivie d’une promotion au grade réel de lieutenant de réserve d’infanterie (rang du 25.12.44 ; décret23.12.44, publ. JO).

Outre la médaille militaire qui lui a été attribuée avant l’Occupation, Albert Brouard reçoit la croix de chevalier de la Légion d’honneur

(décret 31.10.47, publ. JO 21.11.47), la Croix de guerre, la médaille de la Résistance (avec rosette) et la médaille des évadés. Il se voit reconnaître les titres d’interné-résistant et de combattant volontaire de la

Résistance. Il a également droit au port de la médaille des services volontaires de la France Libre. Au titre des décorations étrangères, la Medal of Freedom lui est décernée. Albert Brouard est porteurde la médaille d’honneur de la Police.

Nota :C’est Albert Brouard qui a monté le stratagème pour s’évader avec deux amis prisonniers dont mon père Daniel Rieunier (Voir le dossier joint « 1942 01 09 – RIEUNIER Daniel – Evasion Fort Hauteville ». Il s’agit d’un chapitre tiré d’un livre (non publié) que j’ai écrit sur le parcours de guerre de mon père en 2015). Depuis 2015, je suis en contact avec la petite-fille d’Albert Brouard.

Ci-dessous :  Document d’Inscription d’Albert Brouard dans le registre d’écrou du Fort de Hauteville consulté aux Archives de la Côte d’Or.

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