Jubin François
Auteur de la fiche : Françoise JUBIN (sa fille)
François Jubin
François Jubin est né à Cahors le 21 juin 1916. Sur les traces de son père, médecin du Corps de Santé colonial, il entreprend des études de médecine à l’Ecole de Santé Navale de Bordeaux.
En mars 1940, étudiant en 3ème année de médecine, il est affecté à la Base Aéro Navale de Boulogne-sur-Mer comme médecin-auxiliaire dans une unité de fusiliers marins. Le 15 mai, les blindés allemands envahissent le nord de la France après avoir traversé la Hollande et la Belgique sans coup férir. Les troupes alliées sont encerclées, dos à la mer. Le mot d’ordre pour les troupes présentes à Boulogne est de tenir le plus longtemps possible afin de permettre au corps expéditionnaire britannique de regagner l’Angleterre à partir du port de Dunkerque.
Au-delà de son rôle de médecin qui l’amène à parcourir la ville sous le feu ennemi afin de porter secours aux blessés, François Jubin participe activement aux combats de rue, dernier sursaut dans une lutte sans espoir. Faute d’armes, de munitions et de soutien aérien, la place de Boulogne capitule le 25 mai.
Blessé au combat, il est fait prisonnier. Quelques semaines plus tard, il est emmené dans un convoi de prisonniers en direction de l’Allemagne, en traversant la Belgique et la Hollande. Il s’évade en chemin et retourne à Boulogne, occupée par les Allemands. En ce mois de juillet 1940, après la capitulation de la France, des marins français encore cachés dans la ville lui procurent vêtements et faux papier qui lui permettent de traverser le pays en direction de la zone libre.
Il a pour objectif de rejoindre l’Angleterre en passant par l’Espagne afin de poursuivre le combat. Mais soutien de famille depuis le décès prématuré de son père, il se laisse convaincre par sa famille de renoncer à son projet et de terminer ses études. Il rejoint l’Ecole de Santé Navale repliée en zone libre, à Montpellier, où il poursuit son cursus médical et se marie.
Sa conduite courageuse au combat lui vaut d’être cité à l’ordre de l’armée de mer, du Corps d’Armée, et de la Division avec attribution de la Croix de guerre. Le 7 juin 1941, la Médaille militaire lui est décernée.
A la suite des évènements de la fin de l’année 1942 qui entrainent l’occupation de la zone dite « libre », il ne peut accepter la soumission à l’ennemi de ce qu’il reste de l’armée française. Après avoir tenté en vain de rejoindre les Forces Françaises Libres d’Afrique du Nord, il démissionne de la Marine, passe sa thèse en qualité de civil et s’installe comme médecin généraliste à Lauzès, commune du Lot, sa région natale où il rejoint le mouvement de résistance de l’armée (ORA). Il recrute des hommes, dont de nombreux réfugiés espagnols. Il mène de front les soins aux habitants de la région et ses activités clandestines.
En avril 1944, de nuit, au cours d’un transport d’armes, il se fracture le bras et doit être hospitalisé à Cahors sous un faux nom. Le 11 mai, le premier bataillon du régiment Der Führer de la Division Das Reich remonte vers le nord-ouest du département, avec ordre d’inspecter les voies ferroviaires et les routes. Dans les villages traversés, les allemands procèdent à de nombreuses arrestations et exécutent des civils pour les motifs les plus futiles.
A Lauzès, le Docteur Jubin se trouve dans la maison de son voisin, Georges Marcouly, qui l’accompagne souvent dans ses opérations nocturnes. Il est trop tard pour fuir. C’est dans l’étable du cochon d’une ferme voisine qu’il se cache après en avoir chassé l’occupant qui divague dans les rues du village. Cela ne semble pas alerter les soldats allemands qui le chassent à grands coups de bottes. Plusieurs civils, habitants de Lauzès, sont tués, un Résistant, Lucien Courtiol est capturé et mourra dans un camp de concentration.
François Jubin doit mettre sa famille en lieu sûr. Il les installe à Nabirat, en Dordogne, non loin de Gourdon où naitra sa seconde fille la veille du débarquement. Impatient de se battre sans attendre, il rejoin,t dans les jours qui suivent, les F.T.P.F du commandant Georges (Robert Noireau).
Le 28 juin, tard dans la soirée, au volant de sa voiture et revêtu de son uniforme d’officier de la Marine, il tente de traverser la ville de Gourdon. Ne sachant pas que les allemands occupent la ville, il se trouve à découvert face à un barrage de blindés. Il tente de s’échapper en traversant une vigne, mais les soldats le poursuivent et l’abattent d’une rafale de mitraillette. Ce jour-là, plusieurs civils sont également exécutés et le surlendemain 22 otages de Gourdon sont fusillés près de Boissières. Ce ne sont pas les SS de la Division das Reich qui ont commis les exactions de Gourdon, mais la sinistre 11ème division blindée de la Wehrmarcht.
François Jubin venait d’avoir 28 ans. « Tenant compte des raisons morales qui l’ont déterminé à quitter la Marine, et en considération de son attitude patriotique » il est réintégré dans la Marine, comme médecin d’active et, en mars 1948, il est promu au grade de Médecin de 1ère classe, rétroactivement, à compter du 1er juin 1944.
Le 17 mai 1946, il reçoit la Médaille de la Résistance à titre posthume. Enfin, le 8 août 1949, place Thiers, à Cahors, le Colonel André Pommiès, chef de l’illustre Corps Franc de la Résistance qui porte son nom, remet à sa fille ainée, âgée de 7 ans, la Croix de chevalier de la Légion d’Honneur décernée à titre posthume.
La promotion 1974 de l’Ecole de Santé Navale porte le nom de François Jubin. En 1999, la commune de Lauzès a donné son nom à la nouvelle Maison d’accueil pour personnes âgées (MARPA). En juin 2021, une plaque commémorative a été placée sur le mur d’enceinte de la maison de la famille Mazet, lieu où les allemands l’ont abattu.
Sources :
- Documents familiaux et témoignages –
- SHD de Vincennes : dossier individuel et dossiers concernant la Résistance dans le Lot
- Archives nationales de la Marine de Rochefort : dossier de l’Ecole de Santé Navale
- Archives départementales du Lot
- Presse et ouvrages d’historiens
Une bibliographie détaillée figure dans l’ouvrage publié par sa fille , Françoise Jubin : « Mon père, François Jubin, médecin de la Marine », édité aux Editions EDICAUSSE / 46090 / Arcambal
Site internet : www.francois-jubin.fr