La Résistance dans l’Yonne par Charles Pot

Rencontre prévu le 08/02/2002

Allocution prononcée par Charles POT

Président National de « Libération Nord »

Aux ISLES-MENEFRIER (Yonne)

Dimanche 8 septembre 2002

Nous voici donc ici présents sur ce lieu de MEMOIRE afin que jamais on ne puisse oublier le courage et le sacrifice de ceux qui ont combattu et permis d’anéantir l’oppression nazie.

Mon ami Jean RATHERY a été particulièrement loquace sur ce sujet, ayant lui-même vécu et combattu avec ses nombreux camarades sur ce sol chargé d’histoire.

S’il est vrai que notre Mouvement National « Libération Nord » a payé un très lourd tribut pendant la clandestinité, il faut aussi dire qu’il fut créé dès octobre 1940 au domicile de Christian PINEAU 52, rue de Verneuil PARIS 7ème arrondissement.

Autour de lui, des syndicalistes, des socialistes des membres de cercles philosophiques, des démocrates chrétiens, tels qu’Albert GAZIER, Robert LACOSTE ; Pierre NEUMEYER, Louis SAILLANT, Oreste CAPOCCI ; Gaston TESSIER ; Emile VAN DEPUTT ; Maurice BOULADOUX, tous trois responsables de la C.F.T.C auxquels vinrent se joindre quelques semaines plus tard, notamment par la voie des réseaux de renseignements puis de l’Armée Secrète, nombre d’individualités appartenant aux classes libérales ; à la recherche scientifique ; des hauts fonctionnaires ; des cadres de l’armée… etc. … comme Henri RIBIERE, haut fonctionnaire de la sûreté nationale, ancien combattant de 14/18 et collaborateur de Marx DORMOY, Ministre de l’Intérieur dans le Gouvernement de Léon BLUM en 1936 et qui joua un rôle éminent au sein de «Libération Nord » notamment après l’arrestation et la déportation de Christian PINEAU, le 3 mai 1943. Puis encore René PARODI ; Jean CAVAILLES ; Jean GOSSET ; Charles LAURENT ; Jean TEXCIER ; Alain POHER, TANGUY-PRIGENT, Edouard DEPREUX ; Marcel BONNET ; Albert AUBRY, Paul VERNEYRAS, Roger DENIAU , Louis SELLIER ; Jean BIONDI, Louis VALLON ; Roger PRIOU-VALJEAN, André KLEINPETER ; Jacques BRUNSWIG-BORDIER ; Just EVRARD ; Gabriel THIERRY. Germain RINCENT ; Jean MINJOL ; Jean BOUHEY, qui fut Commissaire de la République à DIJON et aussi Pierre VAUTHIER qui devint responsable dans l’Yonne… Et tant d’autres que je ne puis citer,ainsi que       les         généraux              ZARAPOFF ;      LUGAND ;         FAUCHER ;        BRUNCHER ; DELESTRAINT, morts en déportation ; les généraux AUDIBERT et CHALLE qui furent déportés ét revinrent des camps ; le général MORAGLIA ; les colonels de CARVILLE ; Hubert de LAGARDE, morts en déportation, les colonels de MARGUERITTE, LHERMITTE ; LEONI dit RIVIERE ; Les lieutenants colonels LOUVAT-VALENTIN ; DUC-DAUPHIN, Les commandants LIERRE-BONAVITA, MOULY ; HEYMANN, etc…

Puis la constitution de nos réseaux : PHALANX – COHORS – ASTURIES – ELEUTHERE – BRUTUS, ainsi que de nos groupes d’action: POLICE et PATRIE, Les CLOCHES DES HALLES , de nos sections spéciales, du N.A.P (Noyautage des administrations publiques) , de l’Armée Secrète ; de MAXIMILIEN – (Fer et Etudiants) ainsi que de la presse clandestine.

Ainsi naquit l’une des premières équipe de la Résistance Française en zone occupée.

La plus importante parce qu’elle représentait l’ensemble des couches de la population face à la barbarie nazie.

Londres ne devait pas s’y tromper, surtout lorsque Christian PINEAU à l’initiative de Pierre BROSSOLETTE et du Colonel REMY, rencontra de GAULLE en mars 1942 pour la première fois, le second voyage eut lieu le 14.01.43.

Il ne manqua pas de souligner au chef de la « France Libre » que la cohésion doctrinale de notre mouvement, où se mêlaient à l’ardente volonté de résistance patriotique à l’ennemi, une hostilité sans nuance à la collaboration vichyssoise et au nazisme, un attachement passionné aux valeurs démocratiques ainsi qu’au progrès social.

Et vous connaissez la suite !

Il sera cependant permis de rappeler les pertes subies, durant l’occupation par l’ensemble des réseaux de la France Combattante

8230 morts ; 2578 internés et déportés disparus ; 7380 déportés revenus.

Les réseaux reliés à « Libération Nord » assumeront une très large part de ces sacrifices.

Et vous-mêmes chers camarades et amis, vous n’avez pas été épargnés dans votre région.

Vous avez eu vos morts, vos héros, vos martyrs.

Derrière chaque monument, chaque stèle et chaque plaque aussi humble soit­elle, il faut se souvenir qu’il y eut des larmes et du sang.

Combats, fusillades, arrestations, déportations, tortures, représailles.

C’est chaque fois un de ces dramatiques épisodes vécus sur notre sol qui rejaillit dans nos mémoires.Devant cette stèle édifiée à la mémoire du Régiment que commandait notre Ami Jean CHAPELLE,, le « Commandant VERNEUIL », je m’incline en hommage aux valeureux combattants de l’ombre qui vivaient dans les bois…

A « ces soutiers de LA GLOIRE…

Comme Pierre BROSSOLETTE les appelait! après avoir expliqué en conclusion d’une émission à la B.B.C à Londres, le 23 septembre 1942, que

« … La Gloire est comme ces navires où l’on ne meurt pas seulement à ciel ouvert mais aussi dans l’obscurité pathétique des cales.

C’est ainsi que luttent et que meurent les hommes du combat souterrain de la France. Saluez Les, Français ce sont les soutiers de la Gloire »

Ce sont ces hommes là dont beaucoup n’avaient pas encore 20 ans et qui ont connu tous les dangers, toutes les épreuves, toutes les angoisses de la lutte clandestine et opiniâtre menée sans relâche contre l’occupant nazi qui nous font aujourd’hui obligation d’assurer le « DEVOIR DE MEMOIRE et de VIGILANCE »

D’abord souvenons-nous de ces chefs prestigieux dans le département de l’Yonne

Gloire et Honneur à

Jean CHAPELLE « Commandant VERNEUIL »

Il avait 18 ans lorsqu’il nous rejoignit, par l’intermédiaire de notre cher Jean TEXCIER en septembre 1942 et son nom figure toujours dans les annales de l’Association des anciens « Etudiants Résistants de 1940/1944 » que président nos amies Jeanne BAYET et Hélène VIANNEY, veuve de Philippe VIANNEY le fondateur de « Défense de la France»

– Pierre VAUTHIER

Responsable de « Libération Nord » et du « Parti Socialiste Clandestin » dans l’Yonne et son épouse Germaine, qui très longtemps fut la représentante de notre Association dans ce département.

– Robert MONCHANIN ; Emile MENNECART- Paul HERBIN, fondateur du Groupe BAYARD, à JOIGNY – Claude CHANOT, Jean MAROT- René JEANGIRAUD, Joseph LERICHE- Louis AUBIN (AUXERRE)Puis encore Lucienne CAYOT ; Maurice CARRE; l’Abbé DURAND, sans oublier notre cher Gérard VEE

Et tant d’autres encore…

Rendons une fois encore hommage

à Pierre BROSSOLETTE pionnier et martyr de la Résistance

à Jean MOULIN, unificateur de la Résistance, compagnon de Christian PINEAU et d’Henri RIBIERE qui personnifie la lutte pour la LIBERTÉ. Une lutte qui est allée jusqu’à l’ultime sacrifice. La vie et la mort de Jean MOULIN sont de celles qui figurent désormais dans la légende.

Souhaitant plus particulièrement m’adresser à nos jeunes amis et peut-être au moins jeunes ainsi qu’aux plus âgés qui auraient oublié, je voudrais leur dire que pour nous le « DEVOIR DE MEMOIRE et de VIGILANCE » est un devoir sacré qui doit s’appuyer sur les acteurs et les témoins et s’articuler autour des lieux où se préserve la Mémoire de l’évènement, mais aussi sur la volonté de commémorer les faits historiques.

Conservons toujours en Mémoire la dernière phrase du célèbre appel du 18 juin 1940 lancé par le Général de GAULLE depuis la B.B.C de LONDRES

« Quoi qu’il arrive, la flamme de la Résistance Française ne doit pas .s’éteindre et ne s’éteindra pas. »

C’est le ciment de notre unité qui nous permettra d’assurer la pérennité du monde des combattants de la Résistance.

Nous dirons aussi que

La mémoire se refuse à toute manipulationElle pardonne les crimes des adversaires sans les oublier. Elle apprend que les Droits de l’Homme imposent les devoirs du citoyen.

Elle rappelle que la LIBERTÉ s’arrête là où celle d’autrui commence.

Et surtout la mémoire enseigne que la DÉMOCRATIE à l’inverse des privilèges se mérite.

Telles sont nos raisons essentielles susceptibles d’enrayer le développement du révisionnisme, historique mais aussi de lutter contre la xénophobie, le racisme et l’antisémitisme, mais surtout de préserver notre LIBERTÉ… nos LIBERTÉS.

Je veux encore me permettre de livrer à vos méditations cette célèbre citation de l’éminent chimiste et écrivain républicain italien PRIMO LEVI (1919-1987) arrêté dans les maquis des montagnes du Val d’AOSTE, le 13 décembre 1943, puis déporté à AUSCHWITZ

« Quiconque oublie son passé est condamné à le revivre. »

Et puis enfin ce sera un ultime hommage que nous rendrons à tous nos vaillants et héroïques camarades disparus, torturés, emprisonnés, déportés, tombés devant les pelotons d’exécution, dans les maquis et sur les champs de batailles, dans les rangs des Forces Françaises Combattantes.

Nous n’oublierons pas nos chers camarades rescapés, anciens compagnons qui inexorablement nous quittent au fil des années qui passent ! et au moment où la France entière vient de célébrer le 200ème anniversaire de la naissance de Victor HUGO, je ne puis résister au désir de citer ces phrases de l’illustre écrivain, grand orateur républicain, extraites d’une cantate qu’il écrivit pour Adolphe NOURRIT à l’occasion de la « commémoration des Victoires » qui eut lieu au PANTHEON, le 18 juillet 1831

 

« CEUX QUI PIEUSEMENT SONT

MORTS POUR LA PATRIE

ONT DROIT QU’A LEUR CERCUEIL

LA FOULE VIENNE ET PRIE

 

PARMI LES PLUS  BEAUX NOMS

LE LEUR EST LE PLUS BEAU

 

TOUTE GLOIRE  AUPRÈS D’EUX

PASSE ET TOMBE ÉPHÉMÈRE

ET COMME LE FERAIT UNE MERE

LA VOIX D’UN PEUPLE ENTIER

LES BERCE EN LEUR TOMBEAU. »