Les enfants de Staline. La guerre des partisans soviétiques. 1941-1944.
Par Masha Cerovic Auteur : Masha Cerovic Éditions : Éditions du Seuil, 2018
Le prix Philippe Viannay-Défense de la France, créé en 1991 par les anciens résistants du mouvement Défense de la France, est perpétué par la Fondation depuis la dissolution de leur association en 2006. Le prix 2018 a été décerné à Masha Cerovic pour Les enfants de Staline. La guerre des partisans soviétiques. 1941-1944 (éditions du Seuil).
La lutte des partisans soviétiques est une page importante de la guerre sur le front de l’Est entre 1941 et 1944. 500 000 combattants y ont participé notamment en Biélorussie et en Ukraine. Mais cette page d’histoire reste aussi mal connue, car entourée de nombreux mythes développés par la propagande soviétique, qui s’est efforcée d’intégrer les partisans dans le cadre d’une grande guerre patriotique qui aurait illustré la fidélité des soviétiques au communisme et leur union dans le combat contre le nazisme, y compris au sein des territoires occupés. Avec ce livre, issu de sa thèse de doctorat, Masha Cerovicdémêle le mythe de l’histoire et c’est là tout l’intérêt de son étude historique.
Tout d’abord, Moscou présente la résistance soviétique comme immédiate après la défaite de l’Armée rouge alors que l’on assiste à une démobilisation des populations lors de l’offensive allemande considérée pour certains comme une libération du stalinisme.
Deuxième mythe mis à mal par l’auteur : la mise ne place d’un système centralisé géré par Moscou. Les bandes de partisans sont en réalité autonomes par rapport au pouvoir central et possèdent leur propre stratégie. Localement les chefs de bandes refusent de répondre aux ordres de Moscou et sont en tension permanente avec l’autorité centrale. Des initiatives autonomes sont prises, comme l’abolition des Kolkhozes, pour gagner le soutien des paysans, qui n’allait pas forcément de soi.
Enfin, autre image couramment répandue : les partisans sont le reflet de l’ensemble de la société soviétique. Dans les faits, cette société guerrière est formée majoritairement d’une population masculine, slave et d’origine rurale. Si quelques figures de partisanes ont été érigées en symbole à la fin de la guerre, les femmes, souvent méprisées, ne trouvèrent en réalité pas leur place dans les bandes, demeurant cantonnées à des rôles sexués de ravitaillement et de soins quand elles ne devenaient pas purement des objets sexuels.
Après la guerre, le pouvoir central s’efforce de faire disparaître toute identité collective des partisans suspects à ses yeux d’avoir combattu de façon autonome. Les partisans sont réintégrés dans les rangs de l’Armée rouge et aucune association ne portera leur mémoire.
Frantz Malassis