MADIGOU Roger

Auteur de la fiche : Alain Prigent & Serge Tilly

Roger MADIGOU

MADIGOU Roger

Mouvement : F.T.P. (Franc-Tireur-Partisan)

Date de naissance : 27-11-1923

Date de disparition : 06-05-1944

Son action dans la résistance :

MADIGOU Roger
Né le 27 novembre 1923 à Louargat (Côtes-du-Nord ; Côtes d’Armor), fusillé le 6 mai 1944 à Ploufragan (Côtes-du-Nord ; Côtes d’Armor) ; secrétaire de mairie auxiliaire ; FTP.

Roger Madigou est né à Louargat, localité où son père Jean-Marie Madigou qui dirigeait une petite entreprise du bâtiment, avait été élu maire en 1935 à la tête d’une liste radicale et socialiste. Sa mère, Marie-Françoise Lirzin, originaire de Loc-Envel, commerçante tenant un débit de boisson-épicerie, décéda quelques semaines après la naissance de Roger, le 1er Janvier 1924.

Roger fit ses études à l’école publique de Louargat puis à l’EPS (école primaire supérieure) de Guingamp (Côtes-du-Nord ; Côtes d’Armor).

Il travailla pendant l’Occupation comme remplaçant/auxiliaire à la mairie de Louargat en tant que secrétaire.

Dès octobre 1942, Louis Pichouron, responsable FTP et du PC clandestin dans les Côtes-du-Nord eut des contacts avec Louis Lalès qui contacta Armand Tilly. Roger Madigou se joignit par l’intermédiaire de Paul Nogré au premier groupe de FTP de Louargat prenant la responsabilité de commissaire aux effectifs.

Grâce aux liens familiaux maternels, il fut en liaison avec la compagnie FTP de « La Tour d’Auvergne » de Callac-de-Bretagne. Il participa à la rédaction et la distribution de tracts (FTP et Front National) et favorisa le recrutement, l’encadrement et la formation de nouveaux résistants. Il participa à la saisie de tampons pour la confection des faux papiers ainsi que d’une machine à écrire en mairie de Louargat retrouvée chez Paul Nogré après de son arrestation à Loc-Envel [Côtes-du-Nord ; Côtes d’Armor) le 13 avril 1944.

Il prit part à des missions militaires avec Louis Lalès et Eugène Le Lagadec FTP de Louargat, en particulier la récupération d’armes lors des premiers parachutages, le 3 mars 1944, à Maël-Pestivien (Côtes-du-Nord ; Côtes d’Armor) auprès de Paul Nogré à Loc-Envel.

Le 5 avril 1944, en soirée, Madigou rencontra Armand Tilly à son domicile lors d’une réunion clandestine. Le médecin du village Marc Dassonville, originaire du Nord de la France, qui avait remarqué la présence de Roger Madigou, informa les Allemands.

Dans la nuit alors que Madigou venait de quitter les lieux, la maison fut investie par l’occupant : Armand Tilly eut juste le temps de s’enfuir. Le lendemain 6 avril 1944, Madigou, informé, constitua un groupe de quatre FTP à vélo, avec des armes emballées sur le porte-bagages, pour délivrer Tilly qu’il croyait prisonnier des Allemands.

Mis au courant à temps ils rebroussèrent chemin. Mais au retour de cette mission, le groupe fut interpellé par une patrouille allemande à Kerbol près de Saint-Paul en Louargat. Lors de l’accrochage des coups de feux furent tirés et deux membres du groupe furent blessés.

Si Madigou fut arrêté ses trois camarades réussissent à s’enfuir. Malheureusement deux d’entre eux furent arrêtés plus tard et fusillés : Jean Le Tallec le 16 juin 1944 à Servel près de Lannion [Côtes-du-Nord ; Côtes d’Armor) et Paul Nogré le 23 juin 1944 à Saint¬Jacques-de-la-Lande près de Rennes (Me-et-Vilaine).

Le troisième, Raymond Tanguy, se dégagea en frappant un soldat allemand de ses sabots sans être blessé.
Maintenu ligoté dans un fossé, Roger Madigou attendit longtemps avant d’être transporté dans la sinistre maison de la Pépinière à Plouaret (Côtes-du-Nord ; Côtes d’Armor) où il sera torturé durant un mois.

Il ne parla pas car aucun membre du groupe ne fut arrêté. Avec onze autres FTP tous originaires de l’ouest du département, le 5 mai 1944 il fut condamné à la peine de mort par la Cour Martiale du Tribunal de la Feldkommandantur 665 à Saint-Brieuc « comme franc-tireur ».

C’est sans doute à cet endroit qu’il écrivit une lettre d’adieu adressée à sa famille.

Durant la nuit qui précéda leur exécution, les douze FTP, incarcérés à la maison d’arrêt de Sanit-Brieuc, chantèrent La Marseillaise et L’Internationale et d’autres chants repris par d’autres patriotes également détenus. Durant leur transfert sur le lieu d’exécution des témoins les entendirent chanter de nouveau.

Le 6 mai 1944 il fut fusillé avec onze autres FTP au camp de manoeuvre de Ploufragan près de Saint-Brieuc. Les autorités allemandes exécutèrent Roger Madigou avec ses onze camarades Marcel Bitaille, Eugène Cazoulat, Auguste Dugay, Émile Henry, Maurice Lagadec, Arsène Le Bozec, Charles Le Gallou, Pierre Menguy, Jean Pleiber, François Prigent et Roger Quintric au camp de manoeuvre des Croix en Ploufragan, par groupes de quatre entre 7h10 et 7h31. Dans l’après-midi vers 17h un groupe de sept FTP arrêtés à Plouaret furent fusillés au même endroit. Les dix-neuf corps furent enterrés sur place sans cercueil.

Le décès de Roger Madigou fut constaté par un médecin allemand à 7h21, il avait 21 ans.

Ces exécutions répondaient à une directive du maréchal Erwin Rommel qui, de passage à Quintin (Côtes-du-Nord ; Côtes d’Armor), au mois d’avril 1944, avait ordonné, devant la recrudescence des attentats commis par la Résistance, que soient appliquées les mêmes méthodes qu’en Russie. Le fait qu’elles furent annoncées par la presse régionale de Vichy mit en évidence l’impact sur la population que les autorités d’occupation escomptaient donner à l’événement. Quelques jours après l’exécution, le 12 mai 1944, une gerbe fut déposée au monument aux morts de Callac-de-Bretagne avec cette inscription « Aux héros du 6 mai, fusillés par les boches ». Une oriflamme fut aussi accrochée au monument.

Constatant que la population venait déposer des fleurs à l’endroit de la fusillade, les autorités allemandes, craignant sans doute d’autres manifestations de sympathie, firent exhumer les corps par la Croix-Rouge, puis les pompes funèbres de Saint-Brieuc les mirent dans des caisses en bois et les transportèrent à l’abri de tout regard dans la forêt de L’Hermitage-Lorge (Côtes-du-Nord ; Côtes d’Armor).

En août 1944 lors de la libération du secteur du Méné Bré, alors que les troupes d’occupation battaient en retraite, une grenade incendiaire allemande fut lancée par le soupirail du sous-sol, détruisant la maison des Madigou. Jean-Marie Madigou et sa fille Geneviève, âgée de 26 ans, eurent juste le temps de s’échapper et de se mettre en sécurité dans un abri. On peut encore en 2011 voir les traces de la grenade incendiaire, route de Belle-Isle-en-Terre en bordure de la N12.

Après la Libération, à la demande de Jean-Marie Madigou, Armand Tilly et Louis Lalès FTP, tous les trois originaires de Louargat (Côtes-du-Nord ; Côtes d’Armor), entreprirent des recherches pour retrouver le corps de Roger. Le 18 août, après une enquête assez longue, aidés par un cultivateur de Ploeuc-sur¬Lié (Côtes-du-Nord ; Côtes d’Armor) qui avait repéré, dans une clairière à cinq kilomètres du bourg de L’Hermitage-Lorge (Côtes-du-Nord ; Côtes d’Armor), des monticules de terre, ils exhumèrent dix-neuf « sépultures ».

Passant outre à la réglementation préfectorale sur le transport des personnes décédées, les huit corps des suppliciés de Plouaret et de Louargat furent transportés dans leurs communes d’origine. Le CDL, (Comité Départemental de Libération), prévenu de la présence des onze autres corps, fit le nécessaire pour les rapatrier dans les localités respectives.

Le corps de Roger Madigou fut placé dans un cercueil en zinc et ses obsèques se déroulèrent le 23 août 1944 devant une foule nombreuse à Louargat.

Son père, Jean-Marie Madigou, qui fut réélu aux élections municipales de 1945, à cause de ses occupations professionnelles, ne sollicita pas un autre mandat.

Louis Lalès, président du comité local de Libération, membre du PCF, fut élu par le conseil municipal à sa place.

Le nom de Roger Madigou figure sur le monument des dix-neuf fusillés au camp de manoeuvre des Croix en Ploufragan, sur le monument des fusillés et massacrés de l’Hermitage-Lorge (lieu à proximité où furent découverts les corps) et sur le monument cantonal de Saint-Paul en Louargat.

La place de la mairie de Louargat porte son nom.

Commentaire de l’auteur

Sources : -Archives dép. Côtes d’Armor, 2W83, 2W116, 2W170, 2W235, 2W236, 2W237, 2W238 ; Archives de l’ANACR-22. -Louis Pichouron, Mémoire d’un partisan breton, Presses universitaires de Bretagne, 1969 ; Alain Prigent, Histoire des communistes des Côtes-du-Nord (1920-1945), Saint-Brieuc, 2000 ; Serge Tilly, L’occupation allemande dans les Côtes-du-Nord 11940-19441, Les lieux de mémoire, Cahiers de la Résistance Populaire dans les Côtes-du-Nord, n°10, 2004 et n°11, 2005. -Témoignage d’Armand Tilly et de Robert Le Brun.