Dans l’honneur et par la victoire – Les femmes compagnon de la Libération

Par Guy Krivopissko – Christine Lévisse-Touzé – Vladimir Trouplin   Auteur : Guy Krivopissko – Christine Lévisse-Touzé – Vladimir Trouplin    Éditions : Éditions Tallendier 2008

Aux Editions Tallandier vient de sortir un livre qui réunit les contributions de trois historiens, Guy Krivopissko, Christine Levisse-Touze et Vladimir Trouplin ainsi que les témoignages de Mireille Albrecht, du général Alain de Boissieu, de Daniel Cordier et enfin de Jean-Michel Levy. Cet ouvrage : « Dans l’honneur et par la victoire – Les femmes Compagnon de la Libération » a pour origine le colloque sur les femmes « Compagnon de la Libération » qui s’était tenu en mars 2005, sous le patronage du Maire de Paris à l’auditorium de l’Hôtel de Ville de Paris, à l’occasion de la « journée internationale des femmes ».

Pierre Messmer dans la préface de cet ouvrage, rédigé peu de temps avant sa disparition en 2007 écrivait : « Le rôle des femmes dans la Résistance a été longtemps méconnu ….elles furent, comme les hommes, toutes volontaires. ». Six femmes compagnons pour 1038 croix attribuées aux personnes, c’est assurément peu. Dans le témoignage que le général Alain de Boissieu livre dans cet ouvrage, il assure que le général de Gaulle lui avait « « évoqué sa tristesse qu’aussi peu de femmes résistantes et déportées aient été distinguées comme compagnon. » Un peu avant le départ du général de Gaulle au de début 1946 une cinquantaine de dossiers étaient à l’étude du conseil de l’Ordre. Le décret du 23 janvier 1946 mettant fin à l’attribution des croix de la Libération a mis un terme à ces propositions.

Après avoir rappelé le contexte qui instituait « … cette chevalerie exceptionnelle crée au moment le plus grave de l’Histoire de France.. », les caractéristiques et les particularités des compagnons et de cet Ordre qui incarnent toutes les valeurs de la Résistance et de la Libération, historiens et témoins retracent à tour de rôle, dans beau livre, le parcours de chacune de ces femmes d’exception.

Christine Levisse-Touze évoque celui de Marie Hackin, ancienne élève de l’Ecole du Louvre et épouse du Directeur du Musée Guimet, engagée dans les F.F.L. dès décembre 1940 où elle y organise le Corps féminin de la France libre. Désignée pour accompagner son mari, le cargo qui les transporte, est torpillé le 24 février 1941, les époux Hackin disparaissant « unis dans la mort et les hommages ». Mireille Albrecht qui vécue dix-neuf années s’essaye de répondre à « l’occultation » de cette femme, féministe des années trente, et qui sera, dans la Résistance, suivant le mot de Claude Bourdet « l’âme de Combat, sans elle, le mouvement n’aurai peut-être pas existé ». créé par Henri Frenay. Arrêtée en avril 1943, on ne retrouvera son corps qu’à la Libération, enterré dans le jardin potager de la prison de Fresnes. Pour Daniel Cordier Laure Diebold alsacienne et patriote, est une oubliée de l’histoire, comme tous les anonymes qui peuplèrent « la routine héroïque de la Résistance », où Mado, y fit preuve d’une activité extraordinaire auprès de Jean Moulin. Arrêtée, elle réussit à convaincre la Gestapo qu’elle ne servait que de boîte aux lettres et échappe ainsi à la torture. Guy Krivopissko explique que pour Marcelle Henry, chef de bureau, au Ministère du Travail c’est le choc de la défaite qui l’amène à s’opposer à Vichy et à la collaboration. Agent de liaison elle assure l’hébergement des évadés lors de leur passage à Paris. Arrêtée en juillet 1944 par la Gestapo, puis torturée elle est déportée à Ravensbrück le 16 août 1944 par le dernier convoi quittant Paris. Rapatriée en France, elle décède le 24 avril 1945 à l’hôpital Claude Bernard. Pour Vladimir Trouplin, le parcours d’Emilienne Moreau-Evrard, qui pendant Grande Guerre fut à Loos une héroïque résistante, c’est naturellement qu’elle se retrouve, en 1940, à l’avant-garde de la Résistance. Agent de liaison dans le réseau Brutus, recherchée par la Gestapo, elle rejoint Londres en août 1944 puis est désignée pour siéger à l’Assemblée Consultative Provisoire d’Alger où elle incarne « la Résistance féminine » française. Jean Michel Levy avec pudeur évoque le rôle de sa tante Simone Michel-Levy, rédactrice au centre de recherches et de contrôles des P.T.T., fournit dès 1940 à Londres des renseignements sur l’occupant. Dans le réseau « Action PTT » elle est chargée d’installer des postes émetteurs et de l’acheminement du courrier, en particulier ceux du réseau de la « Confrérie Notre-Dame » (CND) et de l’ « Organisation civile et militaire » (OCM). Arrêtée en novembre 43, torturée, déportée au camp de Flossenbürg où elle continue son action de résistante, elle est pendue le 13 avril 1945, restée fidèle jusqu’au bout à la devise de sa Franche-Comté natale : « Comtois, rends-toi ! Nenni ma fois ».

Merci aux témoins et aux historiens d’avoir fait revivre dans cet ouvrage richement illustré, six femmes « Compagnon de la Libération » oubliées, obscures et sans grade de la Résistance dont le courage et le dévouement sont à l’image des femmes résistantes qui servirent si bien leur pays.