JAMAIN André

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André JAMAIN

Est né le 11 septembre 1913 à ST AGNANT les Marais (17) Ouvrier du bâtiment Plâtrier. Marié 4 enfants. Avec Madeleine, Angèle, Léonine MANUSSET : le 21/12/1935 Christian, né en 1936 Jacques né en 1938, Colette née en 1943 et André né en 1943 (jumeaux).

La guerre.

Le régiment d’André 307ém RI était en position dans les Vosges aux environs de BITCHE. Au moment de la débâcle, André tente de rompre l’encerclement mais est fait prisonnier de guerre à SALLES dans les Vosges, puis à DUISBURG sous le n°79906 d’août 1940 au 20 juin 1941

Il est libéré en raison de sa situation d’aîné d’une famille de 10 enfants et ce, à la suite d’accords institués en 1941 entre Vichy et les Allemands.

La Résistance.

André avait été membre du Parti Communiste Français à partir de 1933 et fut membre de la membre de la Direction à ROCHEFORT non plus n’eut-il aucun mal à nouer contacts avec la Résistance locale implantée solidement à cette époque par le Parti Communiste Français.

En raison de sa situation de prisonnier de guerre libéré, il devait pointer chaque semaine. La plus grande prudence lui était donc imposée. Pourtant après les fusillades de CHATEAUBRIAND, en octobre 1941, il s’engage à fond. Il aménage une cache dissimulée au fond de son jardin, rue des frères JAMAIN (rue du 14 juillet à l’époque) à ROCHEFORT. II devient le pivot du dépôt d’armes et de munitions des Francs Tireurs Partisans (F.T.P.) de la région de ROCHEFORT.

En liaison avec les Résistants chargés d’approvisionner, en liaison avec les Résistants chargés de distribuer le matériel nécessaire à l’action et de le récupérer ensuite. Ces liaisons avaient lieu en dehors de chez lui et aucun membre de sa famille ne connaissait son activité par sécurité.

Il poursuivit son activité jusqu’au 20septembre 1942 : date de son arrestation, circulaire CL/SR du 8 juin 1943 relatant ces faits

Son arrestation.

En raison des événements survenus le 20 septembre 1942 le Front National Rochefortais se manifeste ouvertement pour commémorer l’anniversaire de la victoire de VALMY(1792 victoire sur les Prussiens) afin de susciter un élan patriotique dans la population. Une quinzaine de Résistants son arrêtés en raison de leurs idées et ce, préventivement. André est de ceux là. Ils seront tout libérés le 22 après l’arrestation de Paul-Raymond JAMAIN arrêté alors qu’il transportait un important matériel.

(Toutes les personnes arrêtées ce jour furent relâchées-en dehors de la famille JAMAIN-CHUPIN, et n ‘entraîna aucune répression Paul-Raymond JAMAIN revendiquant seul, la responsabilité des événements survenus ce jour là 20 septembre 1942 à ROCHEFORT)

Mais André fut maintenu sans doute en raison de la filiation avec Raymond.

Les interrogatoires :

Pour des raisons de sécurité, nous ne connaissions pas nos activités et responsabilités. Aussi, André n’eut aucun mal à dérouter ses tortionnaires, en l’occurrence le commissaire CHIRON de la brigade spéciale de BORDEAUX, opérant pour la Charente Maritime. Toutes les confrontations furent négatives. André est transféré à la prison Lafond de La Rochelle accompagnée d’une autorité civile allemande. D’autre part ces précautions étaient prises en prévision d’arrestations éventuelles. SALLE qui fut fusillé à BIARD le 3 septembre 1943, connaissait l’existence du dépôt d’armes. Il donna l’ordre au groupe F.T.P. commandé par Gilles JAMAIN d’évacuer rapidement. Ce qui fut fait. Aussi les perquisitions furent négatives.

La Déportation :

Malgré le mutisme dont André fit courageusement preuve, les nazis ne le relâchèrent pas et il fut Déporté au camp DORANIENBURG-SACHENHAUSEN le 23 janvier 1943 avec ses deux frères Raymond et René. De là il parti dans un Commando d’une quinzaine de mille de détenus de l’usine d’aviation HEINKEL. Il avait le matricule 58111 et fut affecté au block 1, appelé par dérision « Baukommando » en raison de sa condition meurtrière.

 

Au camp :

Plusieurs décennies après la libération, on pourrait encore recueillir de multiples témoignages de rescapés de tous les coins de France du camp et qui ont connu et admiré ce grand gaillard de l m 80. Ce n’est pas un excès d’admiration mais une réalité. Pourquoi ? Pour survivre, les Déportés Résistants dans tous les camps formèrent des organisations clandestines très cloisonnées, avec des principes de sécurité extrêmement rigoureux. Ces organisations étaient dirigées par des Résistants qui avaient fait leurs preuves dans la Résistance et au cours des interrogatoires. Les organisations clandestines devaient :

1)organiser la solidarité pour sauver des vies humaines,

2) organiser le sabotage de la production,

3)organiser le regroupement de façon militaire en prévision de la libération.

André devint un des principaux responsables du block 1 de l’organisation clandestine avec BOUILLETEAU de Mont de Marsan, Eugène VISSE de ST-Vaubourg (Ardennes)

Les premiers mois sont pénibles pour tous les détenus du block 1 chargé des travaux les plus pénibles (terrassement,déchargement des péniches de sable, de gravier, de sable, de ciment – pose de voie ferrée – construction d’une piste pour les V2 – agrandissement du camp par lui-même, aménagement divers).

Manquant de nourriture, blessés par les coups, transplantés dans le milieu hostile que constituent les travaux forcés dirigés par des kapos de droit commun, valets dévoués des S.S. les premiers mois avant que la Résistance ne s’organise sont vraiment meurtriers pour les détenus. Dans tous les kommandos où il est dirigé, André est remarqué, non seulement par sa haute taille, mais aussi pour son exceptionnelle capacité de faire front à toutes les situations. En particulier, la maîtrise de son métier, lui permet d’acquérir une certaine considération de la part des kapos qui ne peuvent faire exécuter certains travaux sans l’aide de cadre qualifiés. Avec le temps, son calme, son aptitude psychologique lui permettront d’acquérir les connaissances nécessaires pour berner les kapos et faire échec aux SS.Les groupes de trois de l’organisation clandestine sous la direction d’André et de ses compagnons, sont rapidement organisés. Ils sauveront bien des vies humaines, et feront naître l’espoir dans le cœur de ceux qui humainement flanchent dans les années 1943-1944-1945.L’organisation clandestine de chaque block est reliée à la direction clandestine du camp animé par Charles DESIRA de PARIS pour les Français et, avec Fernand CHATEL qui participait à un Comité International Clandestin ou son représentées chaque nationalité. Malgré son exceptionnelle constitution, ses larges épaules laissent pointer ses os, et seul la flamme qui l’anime empêche de voir l’effrayante dégradation physique qui s’opère à cause du manque de nourriture, du travail incessant et de ses responsabilités. Pourtant, il reste toujours attentif aux souffrances de chacun, toujours prêt à partager le peu de nourriture, et donnant l’impression que lui n’est pas atteint, mais il tousse. En janvier 1945, les camarades sont inquiets pour Iui. Il ne peut être question de le diriger sur l’infirmerie car ce serait le block des tuberculeux, la mort. Alors s’institue la solidarité. Chaque soir, il reçoit deux tartines qu’on l’oblige à manger devant les responsables car il ne pouvait se dispenser de partager. Ainsi se passe l’hiver 1944-1945 et, approche l’heure de la libération.

L’évacuation :

Les derniers mois l’évacuation des camps provoque une indescriptible pagaille. Les détenus sont poussés par les S.S. affolés dont la réaction suprême est de tuer.

Le camp d’Oranienburg est évacué en direction de STETTIN. 10.000 détenus sur 32.000 périront en 4 jours…

Pour André, c’est d’une autre « marche de la mort » dont il s’agit. Si les privations ont eu raison de sa solide charpente, sa volonté, et l’aide de son frère Raymond lors de cette marche de la route de la mort lui permettra d’attendre la Croix Rouge russe.

Environ 700 détenus quittent le camp HEINKEL (30kms de BERLIN) le 4 avril 1945. Une quarantaine de rescapés sera libérée le 9 mai an matin à LANGUENAN (à 80kms de PRAGUE en TCHECOSLOVAQUIE)

Un mois et quatre jours attelés comme des bœufs aux chariots contenants les rapines des S.S. Ceux qui épuisés tombes sont abattus. Les derniers quinze jours il n’est plus donné de nourriture : l’herbe des chemins constitue le seul aliment. Ce sont des fantômes que les S.S. poussent et abattent sans pitié. Les morts sont chargés dans les chariots qui lorsqu’ils sont pleins sont enterrés dans les fosses communes au hasard des routes de BERLIN à PRAGUE. C’est ainsi que BARBIER de MARANS (Charente Maritime) meurt et repose dans une fosse commune prés d’une briqueterie aux environ de COTTBUS.

Le 5 mai, dans les monts de SUDÈTES, André semble à l’extrême limite à la fin d’une journée particulièrement meurtrière. Désespéré, son frère Raymond lui dit « Je ne rentrerai pas sans toi, si tu lâches je me laisse tomber » Il m’a répondu « Je ne veux pas laisser mes os aux boches, et si cela arrive c’est que je n’aurai pas pu faire autrement. Mais aucun de nous n’a le droit d’abandonner car on aura besoin de nos témoignages. Si tu le peux, il faut rentrer»

J’ai vu, foudroyé, tomber des camarades morts debout essayant d’aller plus loin. Le calvaire d’André est indescriptible, famélique Brûlant de fièvre, titubant, mais ses yeux toujours brûlant de cette flamme, de cette volonté qu’il à su nous insuffler. Il à tenu Et le 9 mai couché vivant dans l’herbe prés du bourg de LANGUENN, nous pensons qu’il vivra. Dans la matinée du 9 mai 1945,

Les troupes russes arrivent et préviennent la Croix Rouge qui se propose d’évacuer immédiatement ceux qui ne peuvent plus marcher et, de les diriger sur la France. Huit Français dont André partent vers la France. Ils seront hospitalisés à COUBERT prés de PARIS. Un seul survivra : Pierre GUYOMMARCH, chemin de LEARD, LE MANS.

Début juillet, André est rapatrié à ROCHEFORT à l’hôpital Maritime, aucun espoir n’est permis. Vers minuit, le 28, je recueillais Son dernier mot, son dernier soupir.

Le retour

Le Front National nous communique :

Nous protestons avec indignation contre les conditions scandaleuses dans lesquelles André JAMAIN à été rapatrié à ROCHEFORT.

Emprisonné par la Gestapo en 1942, détenu à Oranienburg, avec tout ce que cela comporte de traitements barbares, notre camarade avait été libéré par les Alliés. Son état physique était lamentable : Un amaigrissement extrême et les deux poumons pris. Rapatrié en France par avion, il fut traité au centre sanitaire de COUBERT Seine et Marne. Sa famille réclama son transfert à ROCHEFORT pour mieux l’entourer de ses soins. Il fut « mis » en gare d’Austerlitz dans un wagon de troisième. Pas de couchette, pas d’infirmière, pas de garde rien. A TOURS, il dût être transbordé par des soldats qui voyageaient avec lui et qui le descendirent à ROCHEFORT. Il s’évanouit à son arrivée. Le miracle, c’est qu’il ait pu supporter un tel voyage.

Et c’était le 14 juillet 1945 ! Jour symbolique ! Jour d’hommage à tous nos héros Mors, ça recommence ou ça continue ? Un scandale à ajouter aux autres.

Notre camarade vient de mourir.

Il laisse sa mère, une veuve et quatre orphelins. Son frère Gilles à été fusillé le 3 septembre 1943 et le même jour son beau-frère Maurice CHUPIN son oncle Alphonse MAGNAUX. Son frère René, déporté lui non plus, n’est pas rentré d’Allemagne. Seul Raymond, qui l’avait sauvé d’Oranienburg-Sachsenhausen est parmi nous. Bien peu de familles en France ont payé un aussi lourd tribut que la sienne à la cause de la Patrie et de la liberté. Nous admirons son magnifique exemple. Nous nous inclinons devant sa douleur. Nous là ressentons profondément car nous avons connu ce militant héroïque. Demain des phrases magnifiques développeront les louanges officielles. De belles Phrases !…

Mais André JAMAIN est mort.

Sans doute il aurait pu vivre. Et il est mort. A QUI LA FAUTE ?

décorations lui furent remises.

 

Médaille Militaire, Croix de Guerre avec Palmes, Médaille de la

Résistance.

Par Arrêté en date du 24/10/1950 Le Secrétaire d’État aux Forces Armées

Nomme André au Grade d’Adjudant FFI-FT. n°47-1956 du 9-9-1947)sous le N°4610 paru au J.O. le 8 novembre 1950