Présentation du C.N.R.D. 2004/2005

Rencontre prévu le 02/12/2004

Concours National de la Résistance et de la Déportation 2004/005  :

Les Français Libres

Général Alain de Boissieu :

Engangé dès juin 1940 auprès du général de Gaulle qu’il rejoingnit  à Londres en Septembre 1941,  il accompagna le général Leclerc dans ses campagnes, notamment à la Libération de Paris en Août 1944. Bien après la guerre,  de 1971 à 1975,  il deviendra Chef d’État-Major de l’Armée de Terre.

 Tout d’abord je dois me situer dans la France Libre, ainsi que mon camarade Crémieux-Brilhac assis à mes côtés. Nous sommes arrivés en Angleterre le 8 septembre 1941. Nous avons bien sûr appris par la suite ce qui s’était passé le 18 juin 1940 et les jours suivants, mais notre témoignage commence en 1941.

Comme le disait Monsieur Messmer, on a utilisé des gens extrèmement jeunes dans des postes qui ne semblaient pas faits pour eux. Ainsi en arrivant d’URSS nous avons eu une prise d’armes à Kimberley, le général de Gaulle a réuni les 14 officiers qui étaient là et leur a dit qu’il fallait qu’ils s’attendent à repartir en France pour aller faire du recrutement, exécuter des missions et solliciter des gens qui doivent maintenant appartenir à la Résistance.

Je me suis retrouvé à l’État-Major particulier du général de Gaulle à un âge où normalement j’aurais dû commander un peloton ou une section. Mais puisqu’il fallait assumer la mission quelque soit l’âge, on nous a pris finalement très au sérieux. J’étais à l’État-Major particulier pour préparer ma mission en France. Mission que d’ailleurs je n’ai jamais faite car ayant eu à contrôler le registre des agents envoyés en France avec leurs vrais et faux noms le colonel Passy qui dirigeait le B.C.R.A[1] a dit à son bras droit que je ne pouvais pas aller en France étant donné tout ce que je savais. Je suis allé chez le Général Leclerc, ce qui m’a donné l’occasion de participer à toute la campagne de la 2ème D.B.

Arrivé à Londres, la première chose que l’on m’a dite est « qu’il fallait assurer la liaison avec la « maison Passy » du B.C.R.A car Londres est plein d’espions et il est évident que les gens qui vont venir de France ne peuvent être amenés au 4, Carlton Garden ni dans d’autres endroits importants où se trouvaient les Français Libres ».Tous ceux-ci étaient très observés, il y avait non seulement des espions allemands mais aussi 5 ou 10.000 Vichystes à Londres qui n’attendaient qu’une chose c’est que nous ayons des difficultés. Ils étaient même prêts à les provoquer. Par exemple certains Vichystes ont bu aux victoires de Rommel dans un restaurant où nous, les Français Libres, étions en train de dîner. Ca n’a pas duré très longtemps car nous sommes montés à l’étage où se trouvaient les Vichystes et nous avons bu le champagne qu’ils avaient commandé.

En ce qui concerne l’arrivée de Jean Moulin, il fut le premier agent amené par le réseau Confrérie Notre Dame qui était le réseau de Gilbert Pineau et bien entendu on m’a dit un jour qu’il fallait transporter « Monsieur Rex » , à l’époque il s’appelait « Monsieur Rex », dans un endroit de Londres où il devait voir une personnalité, il avait vu le général de Gaulle au Connaught. Il voulait voir un peu Londres et les destructions qui avaient eu lieu dans la Cité. En passant à côté d’une des plus grandes cathédrales de Londres qui avait été bombardé, il m’a dit : « Quel dommage de détruire même les cathédrales ! » et il s’est trouvé qu’en parlant des cathédrales, je me suis aperçu qu’il connaissait celle de Chartres, car il s’est un peu coupé à un moment :il m’avait dit qu’il avait de très bons souvenirs de cette cathédrale et de l’évêque qui était là. J’avais lu que quand il était préfet d’Eure-et-Loir il faisait des photos des vitraux des grandes verrières aidé par l’évêque qui était un grand spécialiste, je me suis dit qu’il était probablement l’ancien préfet d’Eure-et-Loir. Je n’ai pas été au delà parce que je pensais que ça allait le gêner. D’ailleurs malgré le fait qu’il ait un cache-nez on voyait la cicatrice autour de son cou car vous savez qu’il avait tenté de se suicider quand les Allemands l’avait mis en prison pour son refus de signer une espèce d’ordre du jour allemand disant que des soldats de couleur s’étaient mal-conduits avec la population et avec les prisonniers.

La deuxième fois que j’ai vu Jean Moulin, c’était au stage de parachutisme. Comme tout le monde malgré son âge il subissait l’entrainement au sol. Un entrainement assez dur, j’ai eu le même largueur de Jean Moulin, si bien que quand il me voyait à la porte, prêt à sauter, à l’époque je n’avais aucun mérite de ne pas avoir d’hésitation, il me disait : « Vous sautez comme Jean Moulin » ce qui était un grand compliment ; mais c’était uniquement parce que c’était le principe britannique, il faut regarder l’horizon et pas en dessous de soi..

Jeanine Boulanger-Octain :

Jeune Française Libre de 17 ans (en décembre 1940). Présidente depuis de nombreuses années de l’Amicale des Volontaires Féminines de la France Libre.

La spécificité de Français Libres est caractérisée par leur engagement spontané et précoce à un moment où notre pays, la France était plongé dans le marasme, dans la démission, dans l’infâmante occupation d’une partie du territoire national. C’est alors qu’un général français, le général de Gaulle décida de continuer le combat aux côtés de la Grande Bretagne avec les volontaires qui avaient entendu son appel, et constitua ce qui allait devenir la France Libre.

Les Français libres furent les premiers à tenir le destin et l’avenir de la France. C’était inhabituel sans doute mais cela constituait un tournant de l’Histoire, des femmes venant volontairement tenir leur place dans une organisation militaire et participer pleinement à la libération du pays. La participation des femmes dans des opérations de guerre était certes une nouveauté pour les Français mais à l’instar des armées alliées, elles ont su courageusement soutenir leur place avec dévouement et efficacité remplaçant des hommes dans de multiples postes indispensables leur permettant ainsi de rejoindre des unités combattantes. Certains jugèrent peut être notre enthousiasme puéril en nous voyant passer dans les rues de Londres en uniforme kaki. La place des femmes jusqu’à ces jours de 40 était cantonnée à des tâches tout autres. Mais suite à l’appel du 18 juin 1940 pour quelles raisons nous serions nous abstenues de servir alors que notre pays était en détresse. Le message du général de Gaulle s’adressant à tous et à toutes dans ces sombres jours.  Suite à l’Appel, des jeunes filles et des femmes vinrent s’engager à Westminster House où un bureau de recrutement avait été ouvert. Pour des raisons de contrat de reconnaissance par le gouvernement britannique, les premières ne furent convoquées qu’au mois de novembre.

Les jeunes engagées étaient soumises à un entrainement militaire de six semaines, le même que celui des recrues anglaises, puis étaient affectées selon leurs compétences dans différents services des Forces Françaises Libres, dans l’Armée de Terre, l’Armée de l’Air, la Marine et les services de santé en fonction des besoins et des spécialités en rapport avec leurs activités.

Les rares conductrices, car en 39-40 très peu de femmes avaient le permis de conduire, furent affectées dans les États-Majors ou à la conduite des ambulances. Parmi ces volontaires quelques unes étaient déjà présentes en Angleterre, jeunes étudiantes, pensionnaires, jeunes filles au pair qui travaillaient à Londres, Françaises mariées à des sujets britanniques. Mais d’autres de nos amies, des femmes, des jeunes filles sont arrivées de nos lointaines colonies et certaines après maintes difficultés s’évadèrent de France occupée. Rapidement les stages de conductrice ont été crées dans un camp à Kimberley lieu connu des Français Libres pour l’instruction et l’entrainement. Les véhicules rapatriés de l’expédition de Norvège servirent à cet effet. Nous eûmes également des femmes dans la R.A.F.

Mais les services d’accueil, réception des volontaires évadés de France, des cantines, des foyers de marins et d’autres, des standards téléphoniques, des réceptionnistes avaient aussi besoin d’elles. Les virtuoses de la machine à écrire trouvèrent leur place dans les bureaux des  États-Majors. Les infirmières étaient très demandées, affectées au camp de Kimberley, aux dépôts et aux hôpitaux.

En Août 1941 un service social fut crée à l’impulsion d’Éliane Brot, une cinquantaine de personnes compétentes furent recrutées parmi elles une vingtaine furent envoyées en A.E.F.[2] en mars 1942. Également en 1942 un groupe d’infirmières fut envoyé au Gabon, en Syrie et au Caire. Plusieurs volontaires féminines furent engagées au B.C.R.A, elles suivirent le même entrainement de commando que les hommes et une douzaine d’entre elles furent parachutées en France comme radios avec des postes émetteurs. Elles restèrent dans les réseaux jusqu’à la Libération. . Ultérieurement notre chef fut appelée à Alger auprès du général de Gaulle pour mettre au point le rôle des femmes militaires. C’est ainsi que naquirent les A.F.A.T.(Auxiliaires Féminines de l’Armée de Terre)

En cette même année 43, les volontaires féminines des services féminins de la flotte venant d’Angleterre et arrivant à Alger débarquèrent en Corse où les ambulancières furent affectées au régiment des fusilliers marins pour la campagne de France.

En prévision du débarquement en Europe, une mission la M.M.L.A formée afin de préparer l’organisation de l’administration française au fur et à mesure de l’avance des armées alliées et surtout des missions de liaison entre les armées américaines et françaises sur le territoired libéré. Il fallait faire face à la gestion des camps de réfugiés, de personnes déplacées et à l’intendance, nourriture, vêtements, hygiène, courrier pour des groupes très importants.

Au débarquement à Cherbourg en fin juin 1944 les équipes de volontaires féminines furent intégrées parmi le personnel administratif et mirent en pratique les instructions qui avaient été prévues. D’après les statistiques, les historiens, nous aurions été 3% du personnel féminin sur l’ensemble des F.F.L. qui ne comptaient que 68.875 d’entre nous.

Servir la France et participer à la Libération de notre pays constituait notre motivation. Ce but a été atteint au delà de nos espoirs. On peut citer le contenu d’ordonnance qui nous honore. Sans doute y avait-il dans leur intervention une initiative trop neuve pour qu’elle ait été sans défaut et pour que l’esprit français n’en ait pas éprouvé parfois quelques surprises. Mais la justice demande que certaines critiques faciles ne fassent pas oublier les réalités qui font honneur aux filles de France, celles qui les ont vécues ont le droit d’en garder de la fierté.

Jean-Louis Crémieux-Brilhac :

Fait prisonnier en juin 1940, évdadé d’un stalag allemand puis après un périple à pied en hiver 1940-41 interné en URSS avant de réussir à rejoindre Londres et la France Libre en septembre 1941. Sur la B.B.C. il tente de conquérir aux idées de la Résistance l’opinion publique française. Le « Ici Londres » et cette musique en boucle qui l’accompagnait, on le doit un peu à lui.

Je suis comme le général de Boissieu l’a rappelé, l’un de ceux qui sont arrivés à Londres en septembre 1941 et le fait que nous ayons été précédemment prisonnier et coupés du monde sans un jour de liberté faisait que nous ne savions rien de la France Libre sinon le nom du général de Gaulle. Ca a été une découverte pour nous. Et pour ma part il se trouve que j’ai été affecté, en tant qu’engagé militaire bien sûr, en 1942 à un organisme qui avait été créé en septembre 41 précisément qui était le Commissariat à l’Intérieur où j’ai été chargé d’être d’une part Secrétaire du Comité exécutif de propagande de la France Libre chargé d’autre part de faire, à la demande de Jean Moulin, des courriers de documentation parachutés chaque mois en France pour la délégation clandestine et les journaux clandestins. De sorte que comme Stéphane Hessel, comme les gens du B.C.R.A nous avons vécu au rythme des lunaisons. Ce sont les lunaisons correspondant aux allées et venues des agents entre la France et l’Angleterre qui rythmaient notre vie.

Une des activités dont j’ai été le principal témoin était donc l’activité radiophonique dont j’ignorais tout, même l’Appel du 18 juin.C’est Maurice Schuman qui m’a mis au courant, déniaisé, appris ce que c’était que la France Libre que nous vivions tous les jours bien sûr.

Et dans cette France Libre la radio et la guerre des ondes était quelque chose de très important..D’abord il faut se souvenir qu’elle commence par un acte radiophonique et j’insiste là-dessus car cet acte radiophonique a été un acte politique au retentissement immense  mais on peut se demander qui aurait connu de Gaulle 20 ans plus tôt si la même situation s’était produite alors que la radio n’avait pratiquement pas d’auditeur. Au point que René Cassin qui était une haute figure de la France Libre a pu dire un jour d’une façon peut être excessive que c’était la radio qui avait fait le général de Gaulle. En tout cas dès juillet 1940 la radio était devenue pour les Anglais et pour le général de Gaulle un instrument capital dans la guerre des ondes, une guerre des ondes qui se livrait contre tous les postes tenus par les Allemands, Radio Paris en particulier  ou les postes de Vichy.

En juillet 1940, l’Angleterre se trouvait chassée du continent et les relations diplomatiques avaient été rompues par Vichy avec Londres. De sorte que la radio se trouvait être le seul et fragile lien de l’Angleterre avec le continent. Et pour de Gaulle, la radio était quelque chose de capital puisqu’il s’agissait de reconquérir l’opinion française avec ce but ultime de faire rentrer les Français de France eux aussi dans la guerre.

Juillet 40 la B.B.C. crée donc une grande émission de 45 minutes le soir qui s’appelle « Les Français parlent aux Français » à une heure de grande écoute, 20h15 ou 21h15 selon les saisons et Churchill personnellement décide de donner à de Gaulle cinq minutes, cinq minutes dans le cadre de cette émission qu’on appelait « Honneur et Patrie » qui devait être considérées par le général de Gaulle comme lui appartenant. Il pouvait parler à la France et faire connaître à la France ce qu’il voulait. Le général de Gaulle a parlé en 4 ans 60 fois et Maurice Schuman, jeune journaliste de 29 ans, désigné comme porte-parole du général de Gaulle et de la France Libre a parlé plus de mille fois, c’est lui qui a géré ces 5 minutes, il a parlé plus de mille fois à la B.B.C..

De Schuman je pourrai évoquer beaucoup de souvenirs mais le temps est trop court. De son action j’en évoque un seul : le 22 juin 1942 Radio de Vichy annonce que Pierre Laval, Premier Ministre depuis 3 mois va faire le soir à huit heures une émission très importante. Schuman et moi allons au service d’écoute de la France Libre à huit heures et nous entendons Pierre Laval, nous entendons cette phrase scandaleuse : « Je souhaite la victoire de l’Allemagne » . Nous sautons dans un taxi, nous retournons à Carlton Garden, qui était le quartier général du général de Gaulle, Schuman se met derrière sa machine à écrire et à vitesse mitrailleuse tape un texte de réplique. Nous sautons dans un autre taxi, moi je ne voulais pas lâcher Schuman parce que vraiment c’était un grand moment. On arrive à la B.B.C. et je vois mon Schuman à 21h25, c’est-à-dire à peine plus d’une heure après ce qu’avait proféré Laval je vois mon Schuman dans la cabine de verre de la B.B.C. dans la pénombre avec, imaginions nous, toute la Franec devant lui qui espérait-on, écoutait, peut être et mon Schuman qui lance sa réplique : « Pierre Laval s’est mis en dehors de la Nation, Pierre Laval s’est condamné à mort ! » . Quelle réplique ! Quelle rapidité ! Quelle force de propagande !

Je pourrais raconter beaucoup de témoignages de ce type.  Jean peut vous raconter aussi comment se faisait le fonctionnement de cette radio, son style, les débats, les difficultés qu’elle a connues et ce que je voudrais vous faire comprendre est que cette B.B.C. a effectivement, progressivement, reconquis l’opinion française, non pas pour l’engager entièrement dans le combat mais pour faire finalement ce que nous souhaitions, c’est que les résistants soient dans la Nation française comme des poissons dans l’eau.

Comment la B.B.C., comment les Français Libres de  la B.B.C., comment Schuman y sont-ils parvenus ? D’abord par une radio, et un style extraordinairement original mêlant des chansons, des slogans « Radio Paris ment, Radio Paris ment, Radio Paris est allemand ! ». Le soir d’un des pires bombardement sur Londres le 10 mai 1941, le chansonnier français des F.F.L. à la B.B.C. se sent inspiré pour faire une chanson sur un air fameux de Charles Trenet « Boum ! Tout dans Londres fait Boum ! ». Quelle allure ! Quel Courage ! Pour les Anglais et les F.F.L. résister par des chansons aux pires bombardements sur Londres la B.B.C. des F.F.L. a dit la vérité, la B.B.C. des F.F.L. a été la voix de l’Espoir, c’est certain. Pendant des années, surtout pendant les premières, pendant les mois du désespoir, de l’abandon, elle a été la voix de l’Espoir. Elle a été aussi et rapidement un instrument d’information extraordinaire. C’est-à-dire combien la liaison avec le B.C.R.A était importante, car à mesure que les télégrammes, les courriers apportaient des informations sur la France et en 43 nous avions 200 kg d’informations politique sur la France. André Philippe avec qui j’ai travaillé avait sur son bureau quelques mois après qu’ils ont été rédigés les rapports des RG et la synthèse des rapports des préfets. De sorte que la B.B.C. pouvait donner l’impression de savoir tout ce qui se passait en France et d’abord ce que Vichy cachait. Quelle Force ! La force de la vérité aussi en ne dissimulant pas les mauvaises nouvelles. « les nouvelles sont mauvaises ! Ce soir les nouvelles sont très mauvaises ! » quelle force là encore !

Je voudrais aussi insister sur le fait que la B.B.C. est d’autre part devenue un instrument tactique, un instrument de la guerre et de la guerre clandestine, de la guerre sur le sol français. La B.B.C. a donné des instructions, des instructions codées sous la forme de messages personnels, vous en avez entendu parler. Presque chaque soir à partir du printemps 41, des messages personnels précédaient les émissions et ces messages avaient une signification, ils annonçaient ou ordonnaient une opération clandestine aux résistants.   Melpomène se parfume à l’héliotrope  signifiait : le 28 janvier 1943 que l’ambassadeur Massidly pourrait s’embarquer sur un avion qui atterrirait à tel endroit convenu. Et plus tard les messages personnels ont déclenché, pour les Français n’appartenant pas à un groupe de résistance encadré,  l’insurrection du débarquement. Le 4 août 1944 le chapeau de Napoléon est à Peros-Guirec signifiait « déclenchement du soulèvement national pour la Bretagne.

Stéphane Hessel :  

Né en 1917 rejoint les F.F.L. en 41 puis formé en navigateur des F.A.F.L. puis recruté par l’État-Major du général de Gaulle au B.C.R.A qui pilotait les relations entre les F.F.L. et la résistance de l’intérieur. Envoyé en France occupé en mars 1944 et arrêté le 10 juillet 1944 et déporté à Buchenwald et après une tentative d’évasion au camp de Dora d’où il s’échappe.

 

On m’a demandé de parler de la chance que j’ai eue lorsque quittant les forces armées aériennes françaises combattantes on m’a recruté dans cette partie de l’État-Major du général de Gaulle dont le général de Boissieu a déjà parlé, ce bureau de contre-espinnage, de renseignement et d’action qui était chargé auprès du général d’entretenir non seulement des relations de partenariat avec ce qui se passait sur notre sol, c’est-à-dire la Résistance dans ses différentes formes mais chargé aussi de lui apporter des instructions de la part du commandement de la France combattante, de lui apporter également des indications sur ce que les Alliés essayaient de faire à chacune des étapes trop longues, terriblement longues de l’Occupation, car d’année en année en France on espérait voi venir enfin e débarquement et la Libération et il fallait attendre encore un automne, encore un hiver encore un printemps. Pour cela il fallait qu’en France, les gens qui se battaient contre l’Occupation se sentent dirtigés, orientés, soutenus par nous autres qui étions en Angleterre et ui avions pu bénéficier de l’extraordinaire accueil de la nation britannique et de son chef Churchill pour tous ceux qui Français avaient décider de continuer à se battre. Ce fut donc une experience humaine inoubliable d’avoir fait partie de ce moment. Je dirai simplement que le rôle de ce B.C.R.A en communication étroite avec le Commissariat à l’Intérieur était d’entretenir les réseaux de renseignements en France. C’était en somme l’espionnage pratiqué par nos compatriotes au bénéfice de l’État-Major allié. Et l’État-Major allié recevait les renseignements que nos réseaux recueillaient comme l’une des contributions importantes de la France au combat de cette époque.

Nous avions encore relativement peu d’unité combattante, celle que le général de Boissieu a évoqué était encore maigre, mincepas munie de toutes les ressources qu’elle a eues par la suite. C’était encore un moment où il fallait affirmer deux choses :

Il fallait affirmer que les Français étaient nombreux à participer au travail de lutte contre l’envahisseur allemand et ça c’était les réseaux de renseignements qui arrivaient à recueillir des données extrèmement précieuses et utiles sur le smouvements de l’armée allemande, sur leurs positions, sur l’exploitation des ressources françaises par l’Allemagne. Tout cela était des renseignements précieux envoyés sous différentes formes vers Londres.

Il y avait aussi les mouvements de Libération avec lesquels le B.C.R.A était en contact permanent. Et ceux qui avaient essayé de donner à ces mouvements le plus d’efficacité possible et de convaincre nos alliés britanniques et plus tard américain que la France était un élément réel de la Résistance contre l’Allemagne nazie. Là-dessus les mouvements peu connus, peu populaires auprès de nos alliés britanniques ont bénéficié de l’apport exceptionnel d’un homme qui a été évoqué par le général de Boissieu, Jean Moulin chargé par le général de Gaulle de faire autant que possible l’unité de tous ces mouvements et de les rassembler dans un Conseil National de la Résistance constitué en 1943. et c’était très important que cette action soit orientée, connue et organisée avec l’aide du B.C.R.A.

Il ne faut pas imaginer que la tâche du général de Gaulle était facile. On aurait pu croire que nos amis britanniques et plus tard américains auraient pu reconnaître tout de suite que le général de Gaulle était seul à parler au nom de la France et de la continuité républicaine et démocratique de la France. Mais ce n’était pas le cas. Il a fallu imposer aux Alliés le général de Gaulle, comme celui qui était l’image de la vraie France, celle qui allait continuer après la Libération. Et pour cela il fallait que la Résistance indiquât clairement que le chef qu’elle se souhaitait, en qui elle avait confiance n’était pas le Maréchal Pétain, ce n’était pas l’Amiral Darlan, ce n’était même pas quelle que soit sa valeur le général Giraud, c’était seul, à cause des positions qu’il avait prises d’emblée et de la manière dnt il les a conduites, le général de Gaulle.

Un des objectifs de notre B.C.R.A était de faire remonter vers nos alliés la certitude, que la Franec, la vraie, la résistante, celle qui voulait se débarrasser des Allemands considérait le général de Gaulle comme celui pour lequel et avec lequel on se battait. Tout cela a demandé un effort auquel la B.B.C. a énormément contribué.

Au B.C.R.A nous fabriquions les phrases, telles celles qu’il a citées. Melpomèle ça faisait très joli ainsi que le parfum dont elle se parfumait. Ca c’était les moments de joies, de plaisir durant le travail qui était par ailleurs extrèmement dur et parfois extrèmement douloureux car on a perdu beaucoup d’amis dans la Résistance et ceux que nous avons envoyés là-bas ne sont bien souvent pas revenus.  Il fallait considérer que ça c’était malheureusement la guerre. Personne n’aime la guerre mais lorsque l’on est patriote et que son pays est envahi eh bien on fait la guerre et on la fait avec tous les moyens disponibles et sans tenir compte de tout ce qu’il y a de détestable là-dedans.

Mais nous n’aurions rien pu faire s’il n’y avait pas eu en France des femmes et des hommes qui ont sacrifié leur vie, qui ont été exposé et qui ont travaillé, telle Lucie Aubrac.

Lucie Aubrac :

Ca voulait dire quelque chose de très important, puis on me dit : « Maintenant il faut avoir un interrogatoire ». Je me suis dit que ça recommençait. Et on m’emmène à Kimberley, d’abord dans une autre petite maison de Londres où je rencontre justement ces femmes, Claude et d’autres amis de la Résistance que je n’avis pas connus à Londres mais que je connaissais pour les avoir entendus à la B.B.C.. Et on m’emmène ensuite à Kimberley et là, je me trouve devant des jeunes qui s’étaient engagés pour venir se battre en France, des jeunes hommes et des jeunes filles et ils me regardaient comme si c’était moi l’héroïne alors que moi j’arrivai vers eux parce que c’était eux, qui étaient des hommes libres, des femmes libres qui avaient l’uniforme français sur le dos. Alors que je ne suis pas particulièrement militariste, moi, chacun le sait bien, je me trouvais en face de ces gens qui étaient tout émus, il y en avait même qui avaient la larme à l’œil. Et tout d’un coup, ils m’ont interrogée non pas sur les combats mais sur ce qui se passait dans leur village, ce que devenaient leurs parents. « Où est mon père ? », « est-ce que par hasard vous connaîtriez ma mère ? » Il fallait que je réponde à tout ça et je me suis sentie à ce moment-là en parfaite communion avec ces jeunes gens, ces jeunes filles qui deux ans avant étaient peut être mes élèves déjà, puisque j’étais déjà professeur et qui étaient maintenant des soldats, des combattants, tous prêts à se sacrifier pour leur pays. Et j’ai compris qu’on était une espèce unique. Nous n’avions pas 20 ans comme eux, moi j’étais jeune à ce moment-là mais il y avait des vieilles dames, des vieux hommes, des paysans, il y avait toute sorte de gens. On n’était pas classé par l’âge, on était classé par l’amour du pays et l’amour de la liberté. C’est seulement ça que je voudrais dire, c’est que je ne me séparerai jamais dans mon cœur ni dans mon esprit, ni dans ce que j’ai l’occasion de dire un Français Libre, d’un Résistant, un homme en uniforme et un homme ou une femme sans uniforme.

Et puis, puisqu’il faut bien évoquer celui qui a été ce 18 juin 40, celui qui nous a fait comprendre que la guerre n’était ps finie, que la défaite n’était pas définitive et qu’il y avait encore moyen de se battre. Qui a demandé et non pas ordonné, lui qui était pourtant un militaire de carrière qu’on le rejoigne dans la lutte, qu’on se batte en France aussi. Je voudrais parler du général de Gaulle pour lui rendre cet hommage que j’espère que vous garderez. Car des généraux, il n’y en a pas à toutes les générations qui se conduisent comme lui. Alors pensez-y avec l’espoir de cet homme qui nous a donné le courage de nous battre, qui nous a envoyé nous battre en Afrique qui faisait que nos plus grands maquis s’appelaient Bir Hakeim, s’appelaient Koufra, portaient les noms des victoires des Français Libres.

Je voudrais que vous sachiez que ce trait d’union, il a été fait par un homme qui était très grand, qui avait confiance dans la France et qui était sûr que vous, les jeunes qui êtes là aujourd’hui, vous n’oublierez jamais que la liberté que vous avez gagnée, vous êtes ici pour nous certifier que vous aller maintenant la conserver quand nous ne serons plus là.

Maurice Druon :

Auteur du « Chant des Partisans », résistant à Londres dès 1943. Puis correspondant de guerre pour la Radio Nationale. Secrétaire perpétuel de l’Académie Française.

Le Duc de Wellington à la fin de sa vie disait : « Quand je vois tout ce qu’on écrit sur la bataille de Waterloo, il y a des moments où je me demande si j’y étais. » .

Toutes proportions, très très modestement gardées on pourrait dire à peu près autant pour le « Chant des Partisans », parce que j’entends tant de versions sur sa création que je me dis : « Hé, est-ce que j’étais vraimen là ? »

Donnez nous la bonne !!

Écoutez, il faut d’abord situer les choses. Tout Résistant de l’extérieur ou de l’intérieur a obéi à un mouvement individuel et c’est ça qui est très important de souligner c’est que c’est un engagement pris devant soi, pour soi-même, à un moment quelconque, à un moment différent du combat.

Il y a ceux qui ont eu la chance d’entendre l’Appel du 18 juin faisant suite à la triste déclaration du 17 juin. Entre les deux voix, celle de Pétain disait : « Je pense que… »  et qui couvrait de sa gloire la démission et puis la voix : « Moi, Général de Gaulle, j’appelle… » eh bien pour certains ça a été la détermination immédiate.

Je n’ai pas entendu l’Appel du 18 juin du Général, je l’ai lu parce que dans les jours suivants il a été publié dans la presse de province du sud-ouest où il y avait encore une presse qui s’imprimait et qui a mis un entrefilet annonçant l’Appel. Et immédiatement mon premier mouvement et celui aussi de mes jeunes camarades, officiers de cavalerie qui étaient pris dans cette affreuse et humiliante défaite, nous avons eu le mouvement de rejoindre Londres. Les circonstances ne nous ont pas favorisées, je ne rentrerai pas dans le détail…mais pendant deux années, nous avons été mon oncle Joseph Kessel et moi dans la vie française, dans les souffrances de la France et dans l’effort de résistance et il faut bien dire que ce n’était pas la totalité de la population.

Il y avait deux partis, ceux qui étaient dans l’illusion vichyste qui les a entrainés dans la Collaboration et ceux qui écoutaient, portes fermées, volets clos et quelque fois une couverture sur le poste, la radion de Londres qui maintenait l’espoir et dont mon ami Crémieux-Brilhac vous a parlé.

Plus tard, c’est Londres où nous étions rendus en passant la nuit de Noël les Pyrénées, traversant l’Espagne avec quelques aventures, la frontière hispano-portugaise aussi, un hydravion, l’Irlande Patriotic School dont il faudra parler car c’est un passage très intéressant l’endroit où l’on réunissait et filtrait tous les évadés d’Europe et puis on est à Londres présenté au général et chacun recevait ou cherchait sa place.

J’ai fait bien des métiers pendant ce temps-là et c’est comme ça que je recevais des courriers réguliers avec les compliments du lieutenant de brigade. Et il y avait les chefs de la Résistance qui étaient à Londres en mission. Parmi eux Emmanuel d’Astier que j’avais connu en France qui comme ses compagnons disait : « Il faudrait un chant pour unir la Résistance. »  un chant de guerre a toujours entrainé les armées, mais c’était d’autant plus important que là ce n’était pas des soldats qui marchent ensemble, c’était des individus dans des caves ou dans les gares ou dans des greniers qui participaient à un même combat sans se connaître. Et c’était justement pour aider a ce sentiment d’unité entre eux mais aussi avec la résistance extérieure, pour aider à réunir tant de différentes personnes qui ne se connaissaient pas que nous devions créer un chant pour qu’au moins ces gens chantassent les mêmes mots.

On a choisi parmi les airs que composait une jeune compositrice slave qui était à Londres, l’air qui est devenu « le Chant des Partisans » et là il faut se méfier des spécialistes. Germaine Sablon qui avait chanté cet air en Tripolitaine avait pourtant prévenu que sur cet air on ne pourrait jamais mettre de paroles. Mais un soir sur insistance de mes amis à Londres dans un petit hôtel des environs de Londres qui s’appelait « Ashdam Park » à Coulsdon et où les officiers de la France Libre pasaient le week end quand ils en avaient la possibilité, eh bien, on s’est mis au piano. Joseph Kessel connaissaît la musique tsigane car c’était celle qu’on chantait en buvant dans les boîtes de nuit, pour le reste il n’avait aucun don musical et ne reconnaissaît la Marseillaise que parce qu’on se lève quand on la joue. Quant à moi toutes mes connaissances musicales consistaient à connaître à 8 ans « Mi Do Ré Mi », depuis rien.

Mais nous nous sommes assis à ce piano, désaccordé, pour faire ce chant. Et j’ai cherché dans les souvenirs historiques des résistances en France. Pensez aux Chouans ! Les Chouans qui se repéraient dans la nuit en faisant le cri de hibou. Et nous avons commencé un texte avec  « Entends-tu le cri sourd du hibou sur la plaine.. » puis on a trouvé que pour les nazis, les S.S, le hibou était un trop bel oiseau on a barré et on a dit « Amis entends–tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines. » à partir de là les mots se sont enchaînés. On a eu le soucis d’employer les mots les plus simples pour que tout le monde puisse les entendre. Car dans la Résistance, il y avait tous les niveaux de population de l’ouvrier jusqu’aux aristocrates propriétaires de château.

Ca s’est fait assez rapidement en cherchant à ce que chacun des aspect de la Résistance, les sabotages, les assassinats de soldats ennemis. On était en combat, ce n’était pas une blague. On a été dur, on a fait un chant avec des paroles dures, mais des paroles aussi d’espérance. Et puis il y avait nos amis qui étaient dans l’hôtel, il venaient et ouvraient des portes et demandaient si notre Marseillaise était finie.

Nous avons finalement écrit la Marseillaise de la Résistance. Le soir c’était terminé, nous sommes allés à Londres et avons vu des amis chez Emmanuel d’Astier et celui qui savait à peu près chanter a chanté les paroles reprises par tous. Et après quelques minutes tous ont dit « Voilà notre chant de la Résistance ! ».

Georges Caïtucoli :

Parachutiste de la France Libre rattaché aux F.A.F.L., commandant d’un escadron dans une unité d’élite de l’armée britannique, le Special Air Service (S.A.S). Secrétaire Général de la fondation de la France Libre.

Il semble qu’on ne vous a pas assez parlé de ce qui doit vous intéresser plus particulièrement c’est-à-dire des jeunes de votre âge, savoir ce que pouvaient ressentir des hommes et des femmes d’une vingtaine d’années qui en un mois étaient passé d’une guerre sans bataille à la plus épouvantable défaite de nos armées.

Cette guerre, nous en avions au fil des années suivi la venue. L’Allemagne d’Hitler avait envahi l’Autriche puis la Tchécoslovaquie puis elle s’était attaqué à la Pologne, notre alliée en la partageant avec l’U.R.S.S.. Pour tenter d’enrayer ce processus d’annexions successives la France et l’Angleterre entrèrent en guerre en septembre 1939 pendant 10 mois cela ne se traduisit par aucune bataille, ce fut la « Drôle de guerre ». Le 10 Mai blindés, artillerie et aviation spécialisée, disloquèrent notre front et en 4 semaines, nos armées subirent la plus épouvantable défaite que la France ait connue.

J’avais alors un uniforme, j’étais jeune pilote de 20 ans venant d’être affecté à une escadrille spécialisée dans la chasse de nuit. Sans avoir eu le temps d’entrer en opération, nous avons été détruits dès le premier jour de l’offensive allemande. Puis ce fut le déferlement et une retraite épouvantable dans un chaos inimaginable aujourd’hui. Sur les routes se mélangeaient parfois des chars, des camions, des hommes à pied, des charrettes de familles parfois avec du bétail fuyant la zone des combats. L’armée était en déroute. En quelques heures, en quelques semaines, des jeunes pleins d’enthousiasme sûrs d’eux se retrouvaient vaincus. C’est cela que je veux que vous compreniez. Et c’est aussi en pensant à cete situation qu’il faut juger la réaction du petit nombre d’entre eux qui par réflexe patriotique, par un certain sens du devoir décidèrent en ayant entendu l’Appel du 18 juin du général de Gaulle ou sans l’avoir entendu, de poursuivre le combat car principalement et en dehors de tout autre considération, ils ne voulaient pas accepter la défaite de leur pays.

Le désarroi était tel, qu’après la bataille de Dunkerque qui fut marquée par beaucoup d’héroïsme et permit d’évacuer en Grande Bretagne plus de 150.000 soldats français qui se retrouvèrent donc à pied d’œuvre pour répondre à l’appel du général de Gaulle, seuls quelques milliers le firent. La grande majorité revint en France par l’intermédiaire souvent de la Croix rouge internationale. Cette situation est d’autant plus dramatique que dans le même temps des jeunes refusant la défaite prenaient tous les risques pour rejoindre le combat.

C’est comme ça que le 20 juin, deux jours après l’Appel, 5 pilotes s’emparent d’un avion sur l’aérodrome d’Oran pour se rendre à Gibraltar. Mais leur appareil est abattu par les canons de la défense anti-aérienne. Ce seront les premiers morts parmi ceux qui tenteront au risque de leur vie et hélas parfois sans succès de dire non à la défaite.

Les Français Libres, ce fut cela une minorité qui a décidé de tout faire pour continuer le combat, de risquer sa vie pour se battre contre l’ennemi, sur terre sur mer et dans les airs. Le général de Gaulle le 29 novembre, dans un discours à la Radio Londres disait : « Nous mêmes, les Français Libres, nous avons le glorieux devoiret la suprême dignité d’être l’âme de la Résistance nationale. ». Mon camarade de combat Pierre Loastic qui trouvera la mort alors qu’il n’avait pas 18 ans lors d’une mission spéciale en Crète occupée par les Allemands et après avoir détruit avec ses 3 camarades français du S.A.S 22 avions de combat et seulement laissé ces quelques lignes simples et poignantes à sa maman pour rejoindre le général de Gaulle :

« Ma chère Maman,

je t’en supplie, ne me blâme pas ! Mon sang bout dans mes veines, je rêve de porter un fusil et de m’en servir. J’ai pris 100 francs et ma carte d’identité.

Adieu, va je veux être Français, Français encore,Français toujours. »

Ces mots simples et au combien émouvant d’un jeune me paraissent symboliques de l’engagement pour la France Libre. Il fut clair, généreux, désintéressé car la victoire ne pouvait que sembler alméatoire et bien lointaine. La motivation principale fut seulement le refus d’accepter une défaite paraissant pourtant irrémédiable et donc la volonté de poursuivre le combat contre ceux qui avaient envahi notre pays.

Ils ne furent que 53.860 à s’engager ainsi 12.000 y trouvèrent la mort sur tous les fronts. Je voudrais aussi vous préciser que lors du débarquement du 6 juin 1944, le premier mort ne fut pas un Américain ni un Anglais, ce fut un Français du S.A.S tombé dans la nuit du 5 au 6 juin une heure après avoir retrouvé sa Bretagne natale. Il s’appelait Emile Bouettard, nous l’appelions le p’tit vieux parce qu’il avait 27 ans.

 

[1] Bureau Central de renseignement et d’action

[2] Afrique Équatoriale Française