Les Résistantes parisiennes de 1940 à 1944 par Christine Levisse-Touzé

Rencontre prévu le 08/03/2006

Mercredi 8 mars 2006 à l’Hôtel de Ville de Paris, s’est tenu un colloque organisé par Christine Levisse-Touze, directrice du Mémorial Maréchal Leclerc-Musée Jean Moulin, sur le thème : « Des Résistantes parisiennes 1940-1944 ». En ouverture de cette journée d’études, Anne Hidalgo Première Adjointe au Maire de Paris, après avoir salué et remercié les nombreuses résistantes présentes, a rendu hommage à travers elles à toutes « ces anonymes qui prirent une part si active dans l’histoire de la Résistance de la capitale. ». Historiennes et historiens(1) ont ensuite tracé les portraits et les parcours des résistantes parisiennes et des différents rôles qu’elles jouèrent dans la Résistance entre 1940 et 1944.

« Gestionnaires du quotidien », à l’heure allemande, les Parisiennes connaissent d’interminables files d’attente où elles s’essayent avec patience à nourrir et à habiller leur famille que taraudent la faim et le froid. C’est pour elles le temps du « système D » et celui aussi de la solidarité vis-à-vis de tous les exclus du régime. Après la défaite de mai juin 40 les femmes sont seules : le père, le mari ou le frère  ont été tués ou sont aux « Stalags ». Leurs formes de leur résistance sont multiples. Résistance : de ménagères comme celles « de la rue de Buci » qui manifestent contre les privations, résistance d’enseignantes qui refusent les lois raciales du régime, résistance de travailleuses qui à vélo ou dans le landau transportent armes, tracts et journaux ou tracent sur les murs de la ville des « » en forme de victoire. Très tôt, elles sont présentes dans les premiers mouvements comme celui de « Défense de la France » où : Hélène Viannay, Jacqueline Pardon, Charlotte Nadel, Eugénie Gemahling firent merveille où elles sont à l’impression et à la diffusion du journal, tandis que dans le réseau du « Musée de l’homme » Yvonne Oddon ou Germaine Tillon en furent les pionnières. Résistance précoce des femmes communistes comme Madeleine Vincent et Cécile Le Bihan, issues de familles ouvrières, dont l’itinéraire va les conduire tout naturellement à prendre leur part dans la lutte clandestine. Madeleine connaîtra la prison de Loos Lille puis l’univers concentrationnaire, Cécile les joies de la Libération de Paris auprès de son époux le Colonel Rol-Tanguy. Militantes politiques comme Suzanne Buisson, qui meurt en Déportation, dont l’entrée en résistance est le prolongement du combat politique mené au sein du parti socialiste. Résistantes les armes à la main comme Olga Bancic « Pierrette » du groupe « Manouchian » qui attaque les convois allemands, ou France Bloch-Serazin qui fabrique, dans son appartement, grenades et détonateurs, toutes les deux seront décapitées à la hache dans les prisons allemandes. Autre grande figure de cette résistance armée Madeleine Riffaud, présente lors de ce colloque, qui à 20 ans arrête seule un train de la Wehrmacht aux Buttes Chaumont. Résistantes Françaises libres, nées à Paris comme Elisabeth de Miribel qui refusant la défaite, décide de rester à Londres et dactylographie pour le général de Gaulle l’appel du 18 juin 40, ou Tereska Schwartz-Torrès fille d’artistes polonais de renom, qui rejoint Londres et fait partie des « Volontaires féminines de la France Libre » dont l’acte d’engagement porte le numéro 16, ou encore Sonia Vagliano-Eloy née à Paris de mère américaine, arrêtée lors de la manifestation du 11 novembre 40, qui rejoint Londres pour être affectée à la Mission militaire de liaison administrative. Elle rentrera en France dans le sillage des Alliés pour s’occuper des camps de réfugiés. Autre grande figure, celle de Joséphine Baker célèbre en France, sa patrie de cœur, qui s’engage dans les Formations féminines des F.A.F.L.. En septembre 1944, elle reçoit la médaille de la résistance des mains de la fille du général de Gaulle, puis cette « Française d’adoption qui a donné un magnifique exemple à toute l’union française » est décorée de la Légion d’honneur.

Injustement oubliées de l’histoire ? …., aujourd’hui ce colloque rendait hommage à toutes ces héroïnes et aux petites mains du combat clandestin,… discrètes de l’après – Résistance, devenues pour beaucoup des « passeuses de mémoires ». Suivant les mots du colonel Rol-Tanguy elles « ont joué dès l’été 1940 un rôle capital. On ne dira jamais assez ce qu’elles ont réalisé     Sans elles, aucune organisation n’aurait pu exister durablement ».

 

(1)Paule Renée-Bazin et Vladimir Troupin présidaient la séance du matin et de l’après-midi.

Les historiens présents étaient : Julien Blanc, Roger Bourderon, Joëlle Boyer Ben-Kemoun, Joëlle Dusseau, Jean-Louis Goglin, Corinne Jaladieu, et Olivier Wieviorka