L’évadé de la France Libre : Le réseau Bourgogne

Par Georges Broussine   Auteur : Georges Broussine    Éditions : Éditions Taillandier

La lettre d’un aspirant de 22 ans, informant sa hiérarchie de sa « volonté de continuer la lutte », comme l’inconnu de juin 40 Charles de Gaulle. !!! Pour le moins original !!! Geste provocateur, et courageux, reflet de la personnalité de Georges Broussine, et c’est le commencement d’une belle aventure. Dix-neuf mois pour rejoindre « Patriotic School » en Angleterre. Début dans la Résistance quand elle n’était qu’un « désordre de courage », puis une parenthèse « dominicaine avec un certain Bruckberger » auprès de qui il trouve refuge, il est arrêté par la police de Vichy où il séjourne au fort Saint-Nicolas à Marseille. Puis, après un passage dans les geôles franquistes, il rejoint Gibraltar et arrive en juillet 1942 à Londres. Fasciné par les différents visages de cette capitale en guerre, il y rencontre des « free french », quelques milliers d’hommes et de femmes à –la fois unis et désunis- autour du général de Gaulle, et qui en final se retrouvent « pour la victoire de Bir Hakeim et les exploits de l’armée des ombres ». Rencontre aussi avec ces londoniens stoïques, d’une gentillesse amicale envers les français, patients et unis autour d’un seul but : la victoire. Quelques mois à « l’école des agents secrets », après avoir été recruté par le service évasion du B.C.R.A,. en vue d’être envoyé en mission en France. Enfin le 19 février 1943, après un atterrissage mouvementé près de Tours, le lieutenant Bourgogne –son nom de code –« rentre en action ». Il parcourt clandestinement la France depuis Paris, recrute « les piliers », volontaires déterminés, dont quelques figures étonnantes, qui vont former « le réseau Bourgogne » chargé de convoyer vers l’Espagne les aviateurs alliés abattus en France et quelques évadés français. Le voyage en train de ces hommes, accompagnés par de convoyeurs, n’était pas sans risque depuis le « Jardin des Plantes » lieu de rendez-vous près de la Gare d’Austerlitz, jusqu’à Pau, Foix ou Perpignan, dans des trains bondés, inconfortable, et surveillés, pour un trajet plein d’embûches, et interminable. Puis venait, par tous les temps, le dur passage des Pyrénées avec ses sentiers rocailleux, avant d’atteindre Andorre et l’Espagne. Quatre-vingt quinze pour cent des aviateurs alliés sortis sains et saufs de leur avion abattu réussiront à rejoindre l’Angleterre, malgré la traque des occupants et de leurs séides, grâce à tous ces femmes et hommes de bonne volonté formant « une immense chaîne de solidarité »., Et « Bourgogne » de brosser le tableau d’une France où « la rencontre entre un aviateur allié à la porte d’une ferme concrétisait l’engagement du fermier envers les Alliés ». De faire le récit émouvant de ce pilote canadien de la R.A.F. abattu près de Montluçon, où malgré les ordres des Allemands « une foule énorme accompagna le corps jusqu’au cimetière » (4 à 5 000 personnes selon des R.G. de Vichy !!). Georges Broussine va accomplir un énorme travail en cherchant à améliorer la sécurité et aussi la diversification des « filières d’évasion ». La chance et la malchance seront alternativement au rendez-vous, son engagement : courageux et entier. Donnant plus qu’il ne recevait, suivant sa belle formule, il permettait« à ses amis de faire quelque chose d’utile à leur propre cause : celle de leur pays et de la liberté. J’étais, pour tous ces gens merveilleux, le moyen de montrer dans quel camp ils se situaient ». Quel homme de défi ce lieutenant Bourgogne quand il entreprend de faire réaliser un dimanche matin de juin 1944, « en vraie grandeur » le tournage, à Paris, d’une promenade de trois jeunes aviateurs américains évoluant parmi les passants et les nombreux militaires allemands qui faisaient du tourisme, de la place du Trocadéro jusqu’à Notre-Dame. Et Georges Broussine d’affirmer, après la réussite de ce film « où la séquence sur le quai est magnifique », sa conviction « selon laquelle la complicité active ou passive de la population était acquise et aux Alliés et à la Résistance et cela en dépit des risques….. ».

Beau et passionnant récit, raconté avec désinvolture et humour.

Non le « lieutenant Bourgogne » n’est pas une tête brûlée ; à 25 ans, il croît « que le bonheur est dans la liberté et la liberté dans le courage ». Georges Broussine est mort le 31 octobre 2001, à l’âge de 83 ans. Après la guerre il avait entrepris une carrière journalistique.