A la recherche du roi perdu

Par Marie-Clotilde Génin-Jacquey   Auteur : Marie-Clotilde Génin-Jacquey    Éditions : Editions Itinéraires - Coll. Sable de Lune 10, avenue Aristide Briand, 41200 Villefranche-sur-Cher

À la recherche du roi perdu, allusion évidente au titre de l’œuvre principale de Marcel Proust, est un conte qui prend les allures d’un parcours initiatique au terme duquel son auteur, Marie-Clotilde Génin-Jacquey (Guimguimette dans le récit), fille du Compagnon de la Libération René Génin (le roi), retrouve l’image du père qu’elle n’a pas connu. Premier officier supérieur à rallier l’Afrique française libre depuis la métropole en 1940, après un périple à travers le Sahara et l’AOF, René Génin arrive en janvier 1941 à Brazzaville. Engagé en Erythrée, puis en Syrie,  cet officier français libre est tué le 17 juin 1941.

Bien qu’intemporel, ce conte évoque de façon métaphorique le contexte de la Seconde Guerre mondiale et notamment la collaboration de Vichy, la France-Libre les résistants (« courageux facteurs chargés de secrets »), la répression,  la déportation (« Au loin le brouillard s’étendait sur les grands prés marécageux ». « La nuit sans lune pleurait les étoiles qui s’éteignaient en silence, par familles entières »). Il évoque aussi  la séparation due à l’exil ressentie différemment au sein d’une famille de Français libre restée en France. « Pendant ce temps, la reine n’avait plus de nouvelle du roi. Et Guimguimette pensait qu’il s’amusait avec les crocodiles et les hippopotames au pays du soleil. Elle trouvait cela drôle ».

Comme dans tous les contes, des obstacles et des interdits entravent le cheminement du personnage principal. Ainsi, après la mort du roi, la reine interdit à sa fille de « descendre dans le souterrain ». Et, comme dans tous les contes, cet interdit pèse lourd sur le destin de celle-ci Pendant « dix-huit mille sept cent quatre-vingt-neuf jours Guimguimette obéit à la reine. Elle se promenait tristement dans le palais, dans le jardin […]»

L’écriture d’un livre (1) où Marie-Clotilde Génin-Jacquey présente la correspondance de son père (l’ouverture de la porte du souterrain) lui  permet alors de ressusciter le passé, d’abolir les limites de l’oubli imposé par le temps et de mieux comprendre son parcours et les raisons de son engagement au sein des FFL. L’image apaisante et protectrice du père apparaît alors. « Quand elle eut fini [son livre] elle vit à la surface du lac le roi son père. Il était jeune, il était beau, il se baignait au clair de lune […] Et le roi disparut. Mais sa fille avait eu le temps de le voir sourire.»

Ce conte de Marie-Clotilde Génin-Jacquey sublimé par la poésie des illustrations d’Annie Courtiaud est un beau trait d’union intergénérationnelle. Le message du roi est un appel à la vigilance et une invitation à bâtir des passerelles conduisant à un monde plus fraternel.  Cet album, dédié aux 1 038 Compagnons de la Libération en même temps qu’aux arrière-petits-enfants du roi, est également une belle réflexion sur le processus long et complexe du deuil.

Frantz Malassis (2)

 

(1) René Génin, Itinéraire d’un méhariste. De la Mauritanie à l’Afrique française Libre. Lettres présentées par Marie-Clotilde Génin-Jacquey, Saint-Maur-des-Fossés, éditions Sépia, 2004.

La publication de ces écrits intimes (correspondances, journaux personnels) nous permet de pénétrer l’univers mental des Français libres et de cerner plus précisément les motifs de leur ralliement. Dans les correspondances adressées à leurs femmes ou  à leurs proches, les Français libres veulent communiquer leur espoir et leur refus de renoncer.